À l’audience du référé de demande d’expertise faisant suite à notre assignation en justice de Marineland, le delphinarium a joué la carte de la caricature et du discrédit des experts dont nous avions livré les rapports aux magistrats. La méthode est connue, si vous voulez contrer la vérité sans preuves : criez au mensonge et discréditez l’opposant. One Voice vous transmet son point de vue sur l’audience du 25 mai dernier à Grasse (la décision devrait être rendue le 30 juin prochain).
Lors de l’écriture de ce communiqué, nous sortions tout juste de l’audience au tribunal judiciaire de Grasse, où le Marineland nous a traités de menteurs, a déclaré que les experts ayant rédigé les rapports sur Inouk et Moana étaient des militants anti-captivité, et a même imploré qu’on les laisse travailler en paix… Qu’ils changent donc de métier sans exploiter d’animaux !
En l’occurrence, nous demandons justement que le tribunal décide d’ordonner une expertise indépendante. On ne demande ni à avoir accès aux animaux, ni non plus que les experts à qui nous avons fait appel en disposent. Le but est l’évaluation de l’état de santé d’Inouk et de Moana (et plus largement celui de l’eau et des installations, mais toujours dans cette optique). Si l’on suit cette logique, l’équipe de direction de Marineland devrait être d’accord avec nous ! Pourquoi refuser ?
« Les enjeux sont importants dans ce dossier »
La présidente du tribunal l’a annoncé en préambule :
« Je sais que les enjeux sont importants dans ce dossier. Je vous rappelle néanmoins que nous sommes en audience en référé et que vos plaidoiries ne doivent pas être la simple lecture de vos écritures respectives. »
Dents et peau : nous avons exposé les graves problèmes de santé d’Inouk et de Moana
Notre avocate a alors pris la parole pour rappeler que le sujet – l’état de santé des orques qui sont détenues à Marineland – pouvait être vu comme original, mais que la procédure n’en restait pas moins tout ce qu’il y a de plus classique. Une demande d’expertise sur l’état des bassins, de l’eau, et des troubles que cela occasionne sur l’état de santé et de bien-être des orques détenues au delphinarium.
Elle a rappelé les rapports accablants qui pointaient un état de santé très dégradé pour Moana, 11 ans et Inouk, 23 ans.
Sur Moana, la Dre Visser a pu constater des lésions tissulaires sous-dermiques :
« [Elle] recommande que Moana soit retiré dans un sanctuaire en bord de mer où il aurait plus d’espace, de l’eau de mer naturelle et un suivi médical approprié. Au minimum, on ne devrait plus attendre de lui qu’il fasse des tours de cirque en échange de sa nourriture, sa participation aux spectacles devrait cesser immédiatement et on ne devrait pas attendre de lui qu’il se produise alors qu’il présente des lésions tissulaires sous-dermiques. D’autres activités moins stressantes peuvent être mises en place pour aider à maintenir la forme physique de Moana, y compris des séances d’exercice quotidiennes au cours desquelles il n’est pas tenu de « performer ». L’aggravation des lésions du tissu sous-dermique est préoccupante car elle indique un problème sous-jacent dans cette installation. »
Quant au Dr Gallego, il a déclaré dans son attestation :
« L’état de santé de l’orque Moana tel qu’il apparaît sur les images me paraît critique et nécessite une prise en charge vétérinaire urgente. Le processus pathologique dont semble être victime Moana est susceptible de mettre sa vie en danger. Mon avis de professionnel est donc que Moana fasse l’objet d’analyses diagnostiques le plus rapidement possible, et reçoive un traitement conforme aux meilleurs standards de médecine vétérinaire des cétacés. »
Nous avons ajouté qu’une analyse médicale poussée devrait donc être réalisée, et que c’est pour cette raison que nous sollicitions la désignation d’un expert.
L’agressivité non canalisée de Marineland, mensonges et jeux de dupes
L’avocate du delphinarium azuréen, à son tour, a pris la parole et fait preuve d’une agressivité étonnante en défense. Sur les conditions dans lesquelles sont détenues les orques, elle déclare : « Quand on lit les publications de One Voice, on a l’impression que le parc est une sorte de no man’s land qui ne respecterait aucune règle. […] One Voice estime que les orques devraient se développer en sanctuaire et plus en parcs. Ne leur en déplaise, Marineland a le droit de les détenir et de les exploiter. » Y compris au détriment de leur santé, donc…
- Piétiner les diplômes et l’expérience des spécialistes auxquels nous avons fait appel
Elle a prétendu que nous dévoyions la loi, puis a procédé à un dénigrement en règle, en balayant d’un revers de main les rapports et avis de la biologiste marine Ingrid Visser PhD, du vétérinaire Pierre Gallego, de John Jett PhD et de Jeff Ventre MD en ne reconnaissant pas leur compétence, pourtant prouvée. « Ces personnes ne sont pas vétérinaires ni experts. Les rapports ont été rédigés par des militants anti-captivité ». À aucun moment elle ne dira « professeur » ou « docteur » mais « ces personnes », « ces messieurs » ou « cette dame » .
L’argument de Marineland ? Ils seraient membres du Whale Sanctuary Project, le sanctuaire en cours de construction avec lequel nous avons tissé un partenariat (en réalité, ils sont membres du conseil scientifique, ce qui n’est pas le cas de Pierre Gallego, soit dit en passant, qui en est seulement conseiller). Pour le parc, ils sont donc des fanatiques anti-captivité. De son côté, le delphinarium propose l’attestation d’un dresseur. Comprend qui peut.
- Un expert… du dressage ! Et un vétérinaire pas spécialiste des orques
Selon le parc, Inouk a une fragilité dentaire depuis qu’il est tout petit, est traité pour cela et donc ne souffrirait pas.
Il a présenté une attestation d’un « vétérinaire expert zoologique européen ». Sauf que ce vétérinaire consultant au parc Marineland n’est pas spécialisé en orques, ni même en cétacés ! À noter d’ailleurs qu’il ne réside même pas dans la région et ne peut donc assurer un suivi régulier des animaux.
L’avocate adverse a fini en alléguant que dans la nature, Inouk serait déjà mort… Pourtant, à l’état sauvage, les seules orques en voie de disparition sont celles décimées par l’industrie de la captivité dans les années 1970.
Pour Moana également, le delphinarium a balayé d’un revers de main le travail de démonstration des spécialistes. Pour lui, le rapport que nous avons présenté « contient des photos peu claires », et le Dr Gallego « fait étalage de pseudo-problèmes ».
Le delphinarium a alors présenté l’attestation de Monsieur Gojceta qui a pris l’initiative de venir constater la situation par lui-même, alerté par nos publications, nous dit-on. Mais il ne s’agit ni plus ni moins que d’un dresseur de dauphins, coordinateur pour les grands dauphins du Programme Européen pour les espèces menacées. Quel rapport avec les orques ? De plus, il n’est pas vétérinaire et officie à Attica où a été envoyé Ekinox (le fils de Femke), parc grec condamné pour avoir fonctionné sans la moindre autorisation pendant 4 ans.
- Des mensonges et des larmes de crocodile
L’avocate a prétendu que nos plaintes pour Inouk et pour Moana avaient été classées sans suite. Ah bon ?! Quelle étrange affirmation alors même que nous n’avons à ce jour reçu aucune décision de classement. On reconnaît bien là l’industrie qui accuse les défenseurs des animaux de mentir en mentant elle-même.
Enfin, elle a tenté d’amadouer le tribunal en avançant que « le personnel du parc se sent insulté par cette procédure : ils apportent amour et soin aux animaux » et qu’il faudrait laisser le delphinarium travailler en paix…
La décision devrait être rendue le 30 juin prochain.
Photo © One Voice : une de nos banderoles à l’effigie des orques détenues au Marineland devant le tribunal de Grasse, où nous organisions un rassemblement symbolique pour Inouk et Moana le jour de l’audience.