ActualitésAnimaux sauvagesQuestions à Stanislas Broniszewski « le mec d’AVA » !

Savoir Animal10 février 202136 min

AVA (Abolissons la Vénerie Aujourd’hui) est un collectif né dans l’Oise dans les Hauts-de France et s’est étendu sur tout le territoire national. Son objectif premier est d’organiser la résistance des habitants des campagnes contre la chasse à courre autour de chez eux.

Bonjour Stanislas, pouvez-vous vous présenter aux lecteurs de Savoir Animal s’il vous plait ?

Bonjour, je m’appelle Stanislas Broniszewski et j’ai participé à créer AVA (Abolissons la Vénerie Aujourd’hui) fin 2016. Chez moi, à Compiègne, il y avait déjà une vraie tradition d’opposition à la chasse à courre depuis la fin des années 1970 et les habitants des villages environnants sont constamment confrontés à des scènes d’une cruauté inouïe ou même à des invasions chez eux. Les autorités ayant toujours pris le parti de la chasse à courre envers et contre tout, nous avons décidé de structurer un mouvement de résistance, tourné vers les gens qui subissent cette pratique barbare. Depuis, nous avons élargi la lutte au national et c’est devenu un vrai mouvement qui organise des tas de gens pour la défense de la Nature et de la démocratie, partout dans nos campagnes.
Avant cela, j’étais producteur de rap ! Tout un autre monde… Depuis l’explosion d’AVA, j’ai beaucoup moins de temps pour la musique et ma vie a été quelque peu emportée, ce qui cause quelques désagréments. Mais peu importent les petits sacrifices : participer à AVA est une des plus grandes fiertés de ma vie, ne serait-ce que pour tous les animaux qui ont pu être sauvés ou la dynamique positive que nous avons lancé dans des endroits où avant ne régnaient que l’apathie et le fatalisme…

Il est loin le temps où David Chauvet et ses amis de l’association Droits des Animaux, tous vêtus de noirs, empêchés par leur seule présence le déroulement d’une chasse à courre, avez-vous connu cette époque et y a-t-il un lien entre vous et l’équipe de David Chauvet ?

Au début des années 2010, j’étais bien loin de ce monde pour tout vous dire, j’avais plus l’esprit à New-York qu’en forêt. Mais j’ai rattrapé mon retard et David est d’ailleurs une des premières personnes que j’ai contacté pour étudier le sujet, dès 2017. En plus d’être un militant courageux c’est aussi un fin juriste qui nous aide beaucoup, surtout contre l’offensive que les chasseurs à courre mènent envers ceux qui osent s’exprimer, comme nous. Ceci étant dit, l’approche de la lutte est très différente entre DDA et AVA, dans le sens où nous misons tout sur la mobilisation et la solidarité des locaux, quand DDA organisait des coups ponctuels un peu partout. Pour simplifier, on pourrait qualifier la méthode DDA d’activiste, et celle d’AVA de résistante. Cela demande une présence dans chaque lotissement, chaque village, un travail patient de confiance pour se faire la voix de gens qui n’ont pas d’autres option pour se faire entendre. Finalement, AVA a aussi une dimension sociale très importante, mais avec la dignité des animaux comme clé de voûte. Grâce à cela, nous avons été en mesure de montrer à tout le pays ce qui se passait habituellement loin des regards : des cerfs paniqués courant pour leur vie dans les rues des villes, les chiens renversés et abandonnés, les intimidations des riverains…

Pourquoi cet engagement, si courageux, quel a été l’élément déclencheur ?

Déjà, je voudrais dire ceci : aux tout débuts d’AVA, personne n’avais prévu de se retrouver deux fois par semaine en forêt au milieu des chasses ! La situation que l’on connaît aujourd’hui, avec une surveillance constante de la chasse à courre par des dizaines de personnes, s’est construite petit à petit. Nous avons été portés par les événements successifs et il n’est d’ailleurs pas exclu que, demain, la forme du mouvement évolue : notre priorité est de protéger la population et non de la mettre en danger gratuitement. En gardant cela en tête, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger directement la Nature et la faune.

Personnellement, j’ai été élevé avec des animaux autour de moi (des chats à la maison, des vaches devant chez moi) et j’ai aussi toujours été très conscient politiquement des enjeux de classe et des questions écologiques. Mais je n’ai fait de lien entre tout cela que vers 2014-2015, quand j’ai réalisé que la question animale n’était pas du tout séparée du reste de la société, et que la souffrance qu’on leur impose est le fruit de mécanismes économiques et sociaux. Quand en plus, à cette époque je me suis lié d’amitié avec des villageois concernés par la chasse à courre, qui m’ont raconté des histoires hallucinantes de gens devant se battre pour sauver des animaux ou protéger leurs rues, il n’en fallait pas plus. Nous avons rapidement commencé à publier ces histoires, à récolter celles de nos voisins et à mettre tout le monde en contact. L’incident fameux de Lacroix Saint-Ouen, à peine quelques mois plus tard, n’a fait que confirmer notre ligne et accélérer les choses.

Avez-vous peur des veneurs ?

De manière générale, les sorties avec AVA se passent bien car nous avons appris à rester groupés, à désamorcer les conflits inutiles et surtout à filmer chaque altercation pour éviter les mensonges des veneurs. Après, il est vrai qu’en tant que porte-parole je suis particulièrement ciblé par du harcèlement, de la diffamation et des agressions physiques. Pour être franc avec vous, en lançant ce mouvement contre la chasse à courre, je m’attendais quand même à un minimum de code de l’honneur aristocratique en face, mais il n’en a rien été. Qui donc est capable d’inventer des agressions de toutes pièces et de traîner les gens devant les tribunaux pendant des années alors même que plusieurs angles de caméras montrent la vérité ? Qui est capable d’ordonner à ses « valets » de frapper des gens tout en éteignant les caméras de leurs victimes et en criant « au secours » pour donner le change ? Qui donc est capable de créer une page Facebook et y accuser des gens de faire des saluts nazis, d’empoisonner les chiens, de trancher les jarrets des chevaux, pour les faire agresser par leurs sympathisants et s’en laver les mains ?
Avec la chasse à courre, j’ai découvert un monde encore plus abject et révoltant que je ne l’imaginais possible, et encore plus de raisons de lutter pour sa disparition. Les intimidations que vivent les personnes victimes d’incidents dans les villages valent 1000 fois le coup de résister à leurs côtés ! Les gens qui forment le cœur d’AVA n’ont de toutes façons nulle part où fuir, et chaque scandale ne fait que renforcer la mobilisation autour d’eux. En fait, nous avons transformé la peur en or !

Le collectif AVA a sauvé des vies animales et a fait évoluer les mentalités, selon vous, sommes-nous loin de l’abolition de la chasse à courre ?

La mobilisation active des personnes en première ligne, ceux dans les villages et des forêts, est un pas en avant décisif pour faire reculer la barbarie dans notre pays. L’opinion publique est aussi maintenant parfaitement au courant du problème que pose cette pratique au quotidien.
Mais ce n’est que le début du chemin : on le voit bien, le blocage qui permet à la chasse à courre de se maintenir envers et contre tout est politique. Ici et là, des parlementaires tentent bien d’avancer avec des propositions de loi (comme Laurence Rossignol, Bastien Lachaud ou Cédric Villani tout récemment), mais la plupart ne sont même pas mises à l’ordre du jour par leurs groupes parlementaires respectifs. Il faut faire de l’abolition de la chasse à courre un enjeu politique majeur, un marqueur incontournable pour qui veut parler d’écologie aujourd’hui, quel que soit son parti.
La mobilisation populaire, la documentation médiatique et la « politisation » du sujet, tout cela va ensemble, et nous y travaillons d’arrache-pied !

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La rédaction - Savoir Animal

3 commentaires

  • Brégeat

    23 février 2021 à 0h23

    Bravo encore bravo !!!!
    Je n’ai participé qu’à une seule sortie avec AVA.
    Plus je vieillis, plus je vomis la dangerosité de la chasse à courre et de ses adeptes.
    Loisir moyenâgeux et torture gratuite des animaux de la forêt , vers quelle civilisation avançons-nous si nous n’ abolissons pas cette activité cruelle ???

    Répondre

  • Richard

    10 février 2021 à 22h25

    Ne jamais baisser les bras
    Continuez d informer afin que les citoyens
    Normaux comprennent cette BARBARIE d un autre temps et la souffrance de tout ces animaux
    Assassinés uniquement par sadisme et
    Perversité.
    Merci pour votre engagement.

    Répondre

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