Numéro 10Education des adultesQuestion posée à Emmanuelle Pouydebat : quelle est la place du féminisme dans votre livre ?

Savoir Animal16 janvier 202313 min

Auteure de  Coppens, Lucy, moi et les autres, humenSiences

« Tu ne seras jamais chercheuse, tu es… trop fille »

« Je dirais que le féminisme n’avait pas sa place en première écriture, de manière directe. Je n’ai jamais voulu écrire ou raconter l’histoire d’une jeune femme en particulier. Juste l’histoire d’un individu, ici moi, habité !

Mon objectif est dans ce livre le même que d’habitude: transmettre mon émerveillement, ma passion, mes questions, mes cheminements et mes histoires partagées avec des coups de foudre, qu’ils soient avec des animaux ou des humains ! Mon coup de foudre pour Lucy, pour le Professeur Coppens. Puis mes aventures avec tous ces animaux extraordinaires et des étudiants souvent passionnés et avec qui j’ai tissé des liens. Mais à aucun moment je ne me suis dit que je voulais défendre les femmes dans ce monde universitaire puis de la recherche. Néanmoins, en travaillant avec Gilles (l’illustrateur) et Olivia (l’éditrice), je me suis rendue compte et souvenue à quel point mon parcours avait été difficile, en partie du fait que j’étais une femme.

Première femme animalière au zoo de Thoiry… C’était hostile… Des enseignants qui au Lycée puis à l’université vous expliquent que vous n’avez pas le niveau, ou encore que vous n’avez pas les épaules. Beaucoup d’enseignants masculins il faut bien le reconnaitre qui n’ont visiblement vus que mes points faibles ou mes faiblesses, insistant sur l’impossibilité du parcours que je voulais mener. A plusieurs reprises je me suis demandée s’ils auraient eu les mêmes petites attentions négatives si j’avais été un garçon… Pas de place pour le féminisme dans le sens où je prône la passion, le questionnement scientifique et la rencontre animale avant tout. Mais beaucoup de place pour le féminisme indirectement si je prends du recul et que je constate à quel point tout au long de mon parcours des obstacles ont été placés, jusqu’à récemment. Le tout conduisant à un rabaissement insidieux imposé régulièrement par certains mâles dominants malveillants ou souffrants de je ne sais quelle jalousie ou de soucis d’égos que je ne comprends pas car je ne faisais de l’ombre à personne.

Chacun a sa place avec ses points forts et ses points faibles. Mais je sais aujourd’hui qu’en tant que jeune femme puis femme chercheuse, c’est comme s’il fallait  faire deux fois plus ses preuves. Aujourd’hui je pense que les jeunes étudiantes sont plus armées contre les mâles dominants. Et je ne parle pas des gorilles… Qui ont toujours été charmants… Mais leur montrer qu’un parcours réussi, dans le sens accompli, est possible quand on est une femme malgré tous les messages négatifs qu’on nous rabat en permanence est probablement le meilleurs message féministe à leur donner. Elles doivent écouter leur cœur, leur intuition, ce qui les anime. Et jamais les négatifs qui nous entourent. »

Emmanuelle Pouydebat est directrice de recherche en biologie de l’évolution au CNRS et au Muséum national d’histoire naturelle. Médaille d’argent du CNRS, elle est l’auteure de plusieurs livres.

mecadev.cnrs.fr/Pouydebat-Emmanuelle

emmanuelle-pouydebat.weebly.com

Gilles Macagno est dessinateur et auteur d’un nombre important de livres sur les sciences naturelles et parfois les enseigne.


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La rédaction - Savoir Animal

Il y a un commentaire

  • Queffelec

    14 novembre 2023 à 23h00

    Article parue dans une revue de vulgarisation sur le règne animal. la question finale est pertinente..
    La trompe de l’éléphant : “Un chef-d’œuvre de la nature”

    C’EST ainsi qu’un scientifique sud-africain a qualifié la trompe de l’éléphant. Cet appendice sans os et fait de muscles permet à l’éléphant d’aspirer 4 litres d’eau qu’il crache ensuite dans son gosier. S’il n’avait pas de trompe, ce gros animal aurait bien du mal à s’agenouiller chaque fois qu’il voudrait boire. C’est également grâce à sa trompe qu’il peut absorber au moins 230 kilogrammes de végétation par jour. Un éléphant risque littéralement de mourir de faim si cet organe vital est gravement blessé.

    L’éléphant se sert de sa trompe pour faire bien d’autres choses, par exemple sonner l’alarme, caresser un éléphanteau ou le corriger s’il n’est pas sage. Il l’utilise souvent pour s’asperger d’eau ou de boue. Pourquoi de boue? Probablement pour protéger sa peau de la chaleur et des piqûres d’insectes. Pour quelle raison un éléphant brandit-​il parfois sa trompe en l’air à la manière d’un périscope? Pour déterminer la direction du vent et détecter l’odeur d’un intrus. Ainsi, cet organe polyvalent joue non seulement un rôle tactile, mais aussi olfactif. Jim Williams, maintenant disparu, raconte dans son livre Bill l’éléphant (angl.) certaines utilisations intéressantes que l’éléphant fait de sa trompe:

    “S’il ne parvient pas à atteindre avec sa trompe une partie de son corps qui le démange, il ne se frotte pas toujours contre un arbre; il lui arrive de saisir un long bâton et de s’en servir pour se gratter d’une façon très efficace. Si le bâton n’est pas assez long, il en cherchera un autre.

    “Quand il broute de l’herbe, si une motte de terre vient avec la touffe, il la secouera contre son pied jusqu’à ce que la terre se détache; ou bien, si l’eau n’est pas loin, il nettoiera la touffe d’herbe avant de la porter à la bouche.”

    Pendant plus de vingt ans, Jim Williams a soigné les éléphants dressés au transport du bois dans les forêts de teck en Birmanie. Il explique qu’il cachait le médicament dans la nourriture de l’éléphant malade, mais que parfois, à l’aide de sa trompe, celui-ci “extrayait la pilule (aussi petite qu’un comprimé d’aspirine) du tamarin, un fruit de la taille d’une balle de cricket, dans lequel elle avait été introduite. L’animal avait l’air de dire: ‘Tu ne m’auras pas.’”

    Il poursuit: “L’éléphant est également capable de détacher une plante grimpante nouée autour d’un arbre, comme le lierre, avec une plus grande habileté qu’un homme se servant de ses deux mains. C’est parce que ses organes tactiles sont plus sensibles que ceux de l’homme.”

    Si aujourd’hui des ingénieurs en robotique s’efforcent de copier ce chef d’oeuvre, donc des êtres intelligents et réfléchis et sérieux ( un robot ne se construit pas lui-même…) , demandons-nous à juste titre : ‘Qui est à l’origine de ce remarquable organe polyvalent? Le hasard, la sélection naturelle, des mutations aveugles ?… ou un être supérieurement intelligent ?

    Cordialement.

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