Numéro 3Politique & AnimauxQuestions à Madame Vignon, députée de la troisième circonscription de la Haute Garonne : « la problématique du bien-être animal s’est imposée assez tôt à moi »

Savoir Animal15 avril 20216 min
19/09/2008 - le peristyle, la colonnade et le fronton du Palais Bourbon

Dès le début de son mandat, la Députée Corinne Vignon s’est intéressée à la problématique de la maltraitance animale, la conduisant à une participation active à la proposition de loi votée en première lecture le 19 janvier dernier.

Question 1 : Madame Vignon, pourriez-vous s’il vous plait vous présenter à nos lecteurs et nous indiquer les raisons de votre soutien à la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale ?

Je suis Députée de la troisième circonscription de Haute-Garonne et je siège à la Commission des affaires économique de l’Assemblée nationale. Avant d’exercer ce mandat, j’ai été Maire de Flourens de 2014 à 2017, une commune de 2000 habitants, près de Toulouse.

En ce qui concerne la maltraitance animale, j’ai participé dès le début de mon mandat au groupe de travail de l’assemblée ce qui a abouti à cette proposition de loi. D’un point de vue personnel, mon engagement est bien plus ancien, j’ai vécu 10 ans au Costa Rica où j’ai créé un complexe écotouristique dont le but était de protéger les tortues marines en associant à ce projet la population locale. C’est ainsi que la problématique du bien-être animal s’est imposée assez tôt à moi, et elle est devenue une sensibilité extrêmement naturelle et prégnante qui guide mon engagement aujourd’hui.

Question 2 : Après le vote en 1ere lecture, le 29 janvier dernier de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale, vous avez remercié les associations de protection animale qui ont soutenu votre projet, sont-elles nombreuses ? Sont-elles venues à vous ou est-ce l’inverse ?

Certaines associations sont venues à moi au début de mon mandat, mais j’ai également initié des démarches de mon côté afin d’auditionner les associations qui ne s’étaient pas manifestées. 

Elles étaient nombreuses mais surtout très actives, engagées et compétentes. Pour faire un bon travail législatif, il est essentiel de rencontrer ces acteurs afin d’enrichir la réflexion sur ces sujets. J’avais besoin d’échanger avec l’ensemble des associations luttant contre la maltraitance animale, mais également avec les professionnels qui travaillent avec les animaux, car ce sont les seuls à détenir une vérité de terrain sur ces enjeux. 

J’ai donc mené des auditions durant plus de deux ans avec une grande diversité d’acteurs allant du militant associatif, aux circassiens ou encore aux gérants de zoos, ce qui a été capital pour que la rédaction de ce texte de loi repose sur l’expérience des spécialistes de ce secteur.  

Question 3 : Votre amendement concernant l’interdiction des manèges à poneys « qui infligent d’importantes souffrances physiques et psychologique aux équidés » (pour reprendre une partie de votre phrase) a été voté en 1ere lecture, malgré un avis défavorable du ministre de l’Agriculture, ce qui démontre s’il en était besoin l’urgence d’intervenir en la matière. Connaissiez-vous le sujet, était-ce un combat personnel ou le fruit d’une étroite collaboration avec Stéphane Lamart ? La question du devenir de ces animaux se pose. Vont-ils être placés dans des sanctuaires ou les laissera-t-on emmener vers un abattoir, et dans ce cas évidemment personne ne pourra venir les aider…

Stéphane Lamart m’a beaucoup aidé dans ce combat, et nous avons travaillé en étroite collaboration sur ce texte. Mais j’avais une expérience personnelle, qui m’avait profondément marquée. En 2014, avant d’être Maire de la commune de Flourens, à la fête du village, se trouvait un carrousel à poneys et j’avais été choquée par l’exemple flagrant de maltraitance animale que cette attraction représentait. Alors que l’on sait que les équidés sont des animaux extrêmement sensibles, on les voyait attachés toute la journée, sous une tente frappée par le soleil, stressés par les nombreuses nuisances sonores des attractions mécanisées. La souffrance de ces animaux se manifestait par des automutilations, que les équidés s’infligeaient en se cognant les pattes entre elles, ce qui leur provoquait d’évidentes blessures. J’ai donc été choqué par ce spectacle moyenâgeux, que j’ai immédiatement interdit lors de ma prise de fonction à la tête de la mairie. 

Il faut néanmoins penser aux professionnels et à leurs animaux, cette attraction devra se transformer de façon à prendre en compte le ressenti psychologique et physique de l’animal, les promenades en poney existeront toujours mais elles sont faites en longe et en liberté, pratiques bien plus respectueuse des équidés et bien plus agréables pour les enfants qui les chevauchent.

Question 4 : Vous avez écrit « Ce texte permettra une plus grande reconnaissance des droits des animaux en tant qu’êtres vivants », pourriez-vous préciser votre pensée s’il vous plaît ?

En réalité, cette proposition de loi n’est qu’un début, car dans l’absolu ce que je souhaite profondément, c’est qu’il y ait dans la loi, une reconnaissance du statut de l’animal. La création d’un corpus juridique dédiant une réelle existence légale de ces êtres vivants est nécessaire.

La situation actuelle n’est pas satisfaisante, les tribunaux traitent mal les contentieux en la matière, les peines ne sont pas appliquées, les dispositions juridiques régissant le bien-être animal sont dispersées dans une pluralité de codes, la justice est très peu lisible pour les citoyens.

Ce changement de conception, serait une grande avancée d’un point de vue philosophique et juridique.  Notre conception collective du bien-être animal est encore trop restrictive, on ne peut se contenter de considérer qu’un animal bien traité est un animal disposant d’un espace et de nourriture. Il faut comprendre les besoins essentiels de l’animal en tant qu’être vivant, puis les faire respecter en les faisant entrer dans la loi. 

Question 5 : Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est votre projet de brigade de protection animale ?

J’ai rencontré la police, la gendarmerie, les pompiers, le procureur et le préfet de façon à mettre en place une équipe de professionnel formée aux problématiques et aux procédures relatives au bien-être animal. Je suggère une expérimentation sur la Haute-Garonne d’une brigade de spécialistes qui interviendrait dans tout délit concernant les animaux de rente, domestiques ou sauvages.

L’utilité d’une telle organisation est la suivante : lorsque des Officier de police judiciaire (OPJ) interviennent sur tout type d’affaires, et qu’ils constatent par exemples des sévices graves ou des actes de cruauté  à l’égard d’un animal sur le lieu même de leur intervention, il est nécessaire qu’ils aient la possibilité de faire appel à la brigade spécialisée, qui sera d’abord en capacité de les renseigner sur l’attitude à adopter et qui agira par la suite. Nous pourrions donc avoir sur tout le territoire des référents sensibilisés au bien-être animal totalement formés sur les procédures dans ce domaine,

Aujourd’hui, les forces de l’ordre se chargent, bien naturellement et en priorité, des victimes, mais oublient trop souvent de relever, faute de formation, de possibles sévices à l’égard des animaux. Cette brigade serait une solution pérenne pour lutter contre la maltraitance animale, malheureusement trop fréquente.

Corinne Vignon

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