Comment doit-on vous présenter ? Le meilleur ennemi des chasseurs de la Somme ?
[ Rire ] Je suis avant tout naturaliste (aussi appelé écologue) spécialisé dans les mammifères et les oiseaux, plus largement dans la biodiversité en France mais on ne peut pas être spécialiste de toute la faune ou toute la flore. Après des études universitaires et une douzaine d’années à travailler dans le milieu associatif pour l’étude et la protection de la faune et des écosystèmes, je travaille aujourd’hui à mon compte et mon action s’oriente depuis quelques années vers l’enquête sur les pratiques de chasse notamment, d’où une certaine détestation qu’éprouvent certains chasseurs à mon égard.
Pourquoi avoir fait le choix d’ajouter le déterminant possessif « Ma » au mot « campagne » ? Pensez-vous vraiment qu’il existe différentes visions de la campagne ?
Ce livre est le début d’une série thématique à la première personne (je prépare déjà « Ma montagne »). Il ne s’agit pas de ma campagne à moi. J’ai simplement voulu que chaque lecteur puisse s’approprier positivement la campagne, avec un sentiment d’appartenance réciproque, à l’opposé de la domination humaine sur le reste du vivant. Les lecteurs doivent se sentir concernés par la vie sauvage qu’ils découvrent, se sentir responsables de sa sauvegarde et agir avec plaisir, comme une évidence devant sa fragile beauté.
Quel est l’objectif de votre livre ?
Faire découvrir la vie sauvage ou « nature ordinaire » en France et montrer comment on peut agir pour la protéger. J’espère qu’on y apprend plein de petites choses sur les plantes et les animaux parfois méconnus alors qu’ils vivent tout près de nous. Le livre fait le lien entre, d’une part les petites bestioles et les plantes qu’on peut voir en se promenant dans la campagne, et d’autre part les grands enjeux de protection de la biodiversité dont on entend parler tous les jours dans les médias mais qui paraissent un peu abstrait si on n’est pas spécialiste. Je parle des relations historiques et actuelles entre les plantes, les animaux, le paysage rural et le rôle de l’humain dans tout ça.
Doit-on tous se remettre en cause et apprendre à vivre autrement ? Est-ce qu’un homme seul, peut faire évoluer les choses ?
Je pense que nous devons nous remettre en cause, oui. Et nous devons surtout accepter de remettre politiquement en cause notre modèle de développement économique, cause essentielle de destruction massive de la biodiversité. Une personne seule peut avoir un impact positif mais la solution passera par de la politique, d’une manière ou d’une autre, donc collectivement. Au plan individuel, on peut être un écologiste parfait, adopter un mode de vie « zéro déchet, végane, bio local et à vélo », ceci ne suffira hélas pas si les industriels sont autorisés à continuer de faire consommer de la m… à des millions de gens qui, pour une raison ou une autre, ne voudront ou ne pourront jamais changer leur mode de vie. Ce qu’on appelle les petits gestes et les efforts individuels sont importants, encourageons-les, mais le changement viendra par les grandes décisions politiques, sous la pression des citoyens. Personnellement je ne suis qu’un lanceur d’alerte, j’essaie de proposer quelques pistes et des arguments techniques s’agissant de la faune sauvage, en espérant qu’ils soient diffusés parmi les citoyens et les politiques. On peut y arriver, plein d’activistes et d’associations œuvrent de façon formidable, plein d’idées se concrétisent, ça donne de l’espoir.
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La rédaction - Savoir Animal