L’abattoir Sobeval, son directeur et son président sont convoqués ce vendredi 4 mars à 10 h 30, au tribunal judiciaire de Périgueux par citation directe de L214 pour :
- des faits de mauvais traitements commis sur les animaux par un professionnel (délit) ;
- pour ne pas avoir pris toutes les précautions en vue d’épargner aux animaux toute excitation, douleur ou souffrance évitable pendant les opérations d’immobilisation, d’étourdissement, d’abattage et de mise à mort (contravention).
En effet, suite aux images dévoilées par L214 en février 2020, après des mensonges des services vétérinaires et du ministre de l’Agriculture révélés par une fuite de mails, le parquet de Périgueux avait ouvert une enquête judiciaire.
En octobre 2020, la procureure avait annoncé la clôture de l’enquête et un classement sans suite alors même qu’elle reconnaissait les infractions. Estimant ce classement scandaleux, L214 a saisi le tribunal par citation directe pour que les non-conformités relevées à l’abattoir de Sobeval soient jugées.
Abattage conventionnel et rituel en infraction
En février 2020, L214 avait révélé des images de mise à mort des veaux dans cet abattoir de Dordogne qui appartient à la société Vandrie, leader mondial de la viande de veau.
La viande de veau est ensuite commercialisée sous différentes marques et labels (casher, halal, Carrefour, Casino, Label Rouge ou encore Agriculture Biologique). Leur cuir est utilisé dans l’industrie du luxe, par Hermès par exemple.
Dans cet abattoir, environ 3 400 veaux sont tués chaque semaine. Les images montraient leur mise à mort en conventionnel ou en rituel (halal et casher). L214 avait relevé de nombreuses infractions à la réglementation.
→ Lire notre communiqué de presse du 20 février 2020
Mensonges des services de l’État
Les services vétérinaires départementaux et Didier Guillaume, alors ministre de l’Agriculture, avaient immédiatement communiqué sur la prétendue absence de non-conformités de l’établissement.
Une fuite de mail a révélé qu’au sein des services du ministère, les infractions étaient au contraire bien identifiées et qu’il fallait par conséquent préparer des « éléments de langage béton »…
→ Lire notre communiqué de presse du 25 février 2020
La révélation de cette communication fallacieuse des services de l’État a fait perdre son sang-froid à Didier Guillaume alors qu’il était interrogé par un journaliste de France 5.
→ Voir la réaction de Didier Guillaume
Un classement sans suite scandaleux
Suite à la plainte de L214, le parquet a ouvert une enquête. Le dossier pénal confirme les infractions relevées sur les images. Pourtant, la procureure a fait le choix de procéder à un classement sans suite :
« À l’issue des investigations menées sur les faits dénoncés, l’avis de la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) a été sollicité aux fins notamment de vérifier la mise en conformité des pratiques au sein de la SAS SOBEVAL, écrit la procureure. Il ressort du rapport reçu de la DDCSPP que les deux process d’abattage de la Sobeval (conventionnel et rituel) ont été totalement mis en conformité avec la réglementation en vigueur relative à la protection animale. Dans ces conditions, j’ai décidé de ne pas initier de poursuites pénales à l’encontre de quiconque, les non-conformités relevées ayant cessé. La procédure sera par conséquent classée sans suite à raison de la régularisation des infractions. » (Sud Ouest, 19 octobre 2020)
D’une part, cette confiance aveugle du parquet envers des services qui se sont empressés de mentir lors de la révélation des images laisse perplexe. Par ailleurs, quand bien même l’abattoir se serait mis aux normes, il n’en reste pas moins qu’il était en infraction avec la réglementation sur de nombreux points, ce que reconnaît la procureure.
Le procès aura bel et bien lieu
Le dossier pénal et les propos de la procureure ne laissent aucun doute sur les infractions commises à l’abattoir Sobeval. L214 a donc décidé de poursuivre directement l’abattoir en justice. Cette audience débutera à 10 h 30 ce vendredi 4 mars au tribunal judiciaire de Périgueux. L’association sera représentée par Maître Hélène Thouy.
L214 espère des condamnations fermes pour ces infractions graves et nombreuses
Les principales non-conformités relevées sur les images et confirmées dans le dossier pénal concernent :
- l’insuffisance de l’immobilisation des veaux durant la mise à mort sans étourdissement et leur égorgement par cisaillement dans le cadre de l’abattage rituel (halal ou casher) ;
- l’absence d’immobilisation des veaux lors de l’abattage avec étourdissement et les ratés d’étourdissement entraînant la saignée d’animaux encore sensibles et conscients ;
- le défaut d’étourdissement de secours ;
- les temps d’attente excessifs des veaux dans le box d’immobilisation ;
- le défaut de conception des installations et la défectuosité des équipements, en particulier la vue directe des veaux dans le box sur les veaux sur la table d’affalage.
Pour Brigitte Gothière, cofondatrice de L214 : « La réglementation permet de limiter – sans les supprimer – douleur et stress pour les animaux dans les abattoirs. Ne pas appliquer la réglementation, c’est faire le choix délibéré d’infliger des souffrances supplémentaires aux animaux. À l’abattoir Sobeval, les infractions ont entraîné des souffrances aiguës et des agonies prolongées pour ces jeunes animaux, en particulier pour ceux saignés, égorgés ou suspendus alors qu’ils étaient encore conscients.
Le classement sans suite est incompréhensible : les infractions sont confirmées noir sur blanc dans le dossier pénal, reconnues par la procureure. Il était impossible d’en rester là. Nous avons donc assigné cet abattoir par citation directe : les abattoirs ne doivent pas rester des lieux de non-droit. Nous espérons une condamnation ferme et dissuasive. »