Terre d’asile pour animaux en détresse, le Zoo-Refuge de La Tanière à Nogent-le-Phaye (Eure-et-Loir) pourrait officiellement ouvrir ses portes au mois de décembre. Son créateur, Patrick Violas, s’est exprimé sur ce projet de longue haleine, une belle aventure qu’il partage avec son épouse.
Si la situation sanitaire venait à s’améliorer, le Zoo-Refuge de La Tanière pourrait officiellement ouvrir ses portes d’ici la fin de l’année. Qu’attendez-vous de cette nouvelle étape ?
Nous avons hâte de pouvoir ouvrir, nous sommes prêts. J’espère avoir le feu vert au mois de décembre mais plus les jours passent moins j’en suis convaincu. Cela fait trois ans que le chantier dure et économiquement, c’est important que l’on puisse ouvrir.
A l’origine, l’ouverture était prévue en juin dernier mais a finalement été retardée. En octobre, durant les vacances de la Toussaint, nous étions toujours en chantier mais nous avons décidé d’ouvrir nos portes aux visiteurs afin qu’ils puissent le découvrir et le visiter. Nous avons organisé des visites guidées durant lesquelles le public pouvait apercevoir une bonne partie de nos animaux. Cela a été très apprécié. En dix jours, nous avons reçu près de 6.000 personnes. Nous avons eu quatre fois plus de demandes mais en raison de la situation sanitaire, nous ne pouvions accueillir plus de monde.
Vous avez la dénomination de Zoo-Refuge. En quoi votre établissement diffère-t-il d’un parc zoologique ?
Nous sommes avant tout un refuge. Notre concept est différent, il n’y a aucun but lucratif, pas de spectacle. Nos animaux ont un passé souvent chaotique, ils ont été maltraités, détenus illégalement, issus de trafics, utilisés dans les cirques ou laboratoires. Nous tentons de leur offrir une seconde vie plus apaisée.
Avec mon épouse, nous avons décidé d’ouvrir le site au public pour deux raisons. La première est pédagogique. Ici, chaque animal a un prénom, une histoire. A l’aide d’audiophones, nous expliquons à nos visiteurs leurs parcours, leurs spécificités et les raisons pour lesquelles ils sont parmi nous. Nous essayons de faire comprendre aux enfants l’importance du respect envers les animaux. En leur enseignant cette notion le plus tôt possible, nous pensons qu’en deux générations, le message sera passé. Nous aurons gagné le combat et nous accueillerons, je l’espère, moins d’animaux.
La seconde est économique. Nous ne sommes pas dans un monde de « bisounours ». Si nous voulons faire fonctionner le site correctement, il faut beaucoup d’argent et nous savons que nous ne pouvons pas compter uniquement sur la générosité publique.
Votre plus grosse opération de sauvetage a eu lieu très récemment. Au total, 31 chevaux ont été récupérés dans l’Yonne par vos soins. Pouvez-vous toujours accueillir les animaux dans le besoin ?
Chaque jour, nous recevons quatre à cinq demandes. Nous essayons de trouver des solutions pour ces animaux avant d’intervenir s’il n’y en a aucune. La majorité du temps, nous procédons à des replacements en mettant les différents acteurs en relation. Aussi, nous les aidons parfois à se régulariser. Nous les aidons administrativement à faire le nécessaire pour être en règle dans la mesure où l’on sait que l’animal évolue dans de bonnes conditions.
Lors de notre intervention auprès des chevaux, nous avons décoincé une situation qui durait depuis des années. Tant que personne ne voulait s’en occuper, le procureur n’ordonnait pas leur saisie. Notre association a joué tout son rôle.
Quand on fait appel à nous, comme dans ce cas-là, nous ne pouvons accueillir une trentaine d’animaux du jour au lendemain. Il faut donc trouver des solutions. Après avoir choisi un lieu adapté, il doit être clôturé avant d’accueillir les nouveaux habitants. Ce travail demande généralement un à deux mois.
Par quels moyens parvenez-vous à financer cette grande structure ?
Jusqu’à présent, nos seuls fonds personnels ont été utilisés car nous avons réussi notre première vie professionnelle. Nous avons vendu en 2009 notre entreprise (plus de 270 boutiques et 1800 employés, NDLR) pour monter un projet qui nous tenait plus à cœur. Nous avons mis à l’abri des ressources suffisantes pour vivre et le reste (28 millions d’euros) a été placé dans La Tanière. Pour avoir de l’aide, un fond de dotation a été créé. Il deviendra, dans les semaines qui suivent, une Fondation.
Pour l’avenir, nous sommes relativement rassurés car nous avons enregistré plus de 40 legs d’héritage. Aujourd’hui, nous sommes à la recherche de grands mécènes mais la générosité du public est bien présente et nous permet d’assurer une petite partie du fonctionnement en attendant de pouvoir ouvrir.
Les annonces de Barbara Pompili annonçant l’interdiction progressive des animaux sauvages dans les cirques ont-elles poussé certains dresseurs de fauves à faire appel à vous ?
Nous travaillons avec eux depuis deux ans, nous en rencontrons régulièrement. Il ne faut pas stigmatiser les circassiens. C’est comme partout, il y a de bonnes et de moins bonnes personnes. J’ai toujours dit que le problème dans ce monde-là était lié aux transports et installations. Ce sont les conditions de détention qui ne sont pas bonnes. Les circassiens sont intelligents et savent depuis longtemps que leur métier va évoluer. Tôt ou tard, tout s’arrêtera mais certains sont prêts à tout pour ne pas renoncer. Si le ministère leur donne quelques années pour mettre un terme à leur activité, la transition pourrait se passer tranquillement. Il faudrait écrire une charte de bonne conduite. En y adhérant par exemple, ils ne pourraient plus déplacer leurs animaux tous les jours ou toutes les semaines. Les installations devraient être appropriées, les mètres carrés pour les animaux suffisants et les contrôles de naissance et vétérinaires importants.
Les circassiens sont prêts à trouver des solutions, j’en suis sûr pour en avoir discuté avec eux. Le problème aujourd’hui, c’est qu’ils ont du mal à communiquer avec le ministère. Ils ne parlent pas le même langage. Nous essayons de faire l’interface.
D’un point de vue personnel, pensez-vous que la population et les politiciens commencent à prendre conscience de la réalité des souffrances envers les animaux ? Que peut-on espérer pour la suite ?
Bien évidemment, depuis trois ans, les mentalités ont changé. De nouveaux députés, plus jeunes, ont permis d’améliorer la condition animale grâce à leur sensibilité. Même si la loi en faveur du bien-être animal, portée par Cédric Villani, n’est pas passée, le dossier est sur la table. Il y a une vraie prise de conscience.
Malgré tout, il faut poser certaines limites. Après les cirques, ils s’attaqueront à bien d’autres domaines d’activités comme les zoos. Certains doivent être regardés de plus près, c’est certain, mais il faut faire cela intelligemment. Chaque dossier doit être pris à part. Il ne faut pas être extrémiste car sinon nous n’aurons bientôt plus l’autorisation de monter à cheval ou de jouer au tiercé.
Vous avez écrit deux livres sur onze de vos petits protégés dont l’ours Mischa qui avait été sauvé après avoir été maltraité et exhibé lors de spectacles durant près de 11 ans. Qu’est-ce qui vous a poussé à sortir ces ouvrages ? (« Une famille pas comme les autres », Ed. Albin Michel / « Les grandes histoires de La Tanière », Ed. Flammarion Père Castor)
Nous voulions faire de la pédagogie, expliquer à tous ce que nous faisons au quotidien. Nous voulions aussi faire comprendre que notre refuge n’est pas triste. Ce n’est pas un mouroir, bien au contraire. Je suis contre ce nom de sanctuaire que l’on utilise souvent pour décrire un endroit où l’on place des animaux en fin de vie. La Tanière est un refuge rempli de joie, nous sauvons des animaux.
Dans ces deux livres (l’un destiné aux adultes et l’autre aux enfants, NDLR) nous racontons par exemple l’histoire de Cannelle le primate, ma petite chouchoute. Elle est entrée en cage de laboratoire à l’âge de deux ans avant d’en ressortir à 21. Elle a passé 19 ans au service de la recherche pour les maladies d’Alzheimer et de Parkinson. Lors de nos visites guidées, je vais parfois à la rencontre de nos visiteurs et prends le temps de leur expliquer, surtout aux enfants, qu’il est parfois essentiel de tester la recherche sur des vivants, notamment sur des animaux. Nous ne jugeons jamais.
Nous leur expliquons que leurs grands-parents pourraient malheureusement être atteints par l’une de ces maladies et qu’ils pourraient y faire face plus sereinement grâce à des traitements et donc grâce à Cannelle. Les enfants sont amenés à réfléchir et à se forger leur propre opinion.
Amandine Zirah
Rédactrice freelance
5 commentaires
Rocca
15 décembre 2020 à 10h50
Félicitations dommage que votre fondation ne soit pas davantage connue afin que les dons soient plus nombreux , je n’y manquerai pas
GUILLET
22 novembre 2020 à 21h57
J ai regardé avec beaucoup d intérêt, un reportage sur votre domaine, merci pour tout ce que vous faites, pour le bien être des animaux, je regrette d etre si loin de vous et,de ne pouvoir vous rejoindre.Dans ce monde devenu complètement délirant,où seul le profis compte,ca fait du bien de voir,qu il y a encore des gens comme vous.Jevous souhaite un grand succès et beaucoup de bonheur près de vos protégés
Cordialement
GUILLET
22 novembre 2020 à 15h49
Merci à vous TOUS qui vous investissez dans une nouvelle vie pour ces animaux et leur donnez
de l’amour ! Dommage que je ne sois pas dans la région, je vous aurai rejointe.
Que de bonheur de voir qu’il y a des gens qui s’investissent pour donner, enfin du Bonheur à
ces pauvres démunis.
Merci Merci. Geneviève
Laure-Isabelle Couppé
22 novembre 2020 à 14h21
Ce projet est magnifique! Merci à tous ceux qui s’impliquent pour permettre une vie plus douce aux animaux blessés, parqués, exploités, privés de liberté et d’amour…
Je souhaite de tout cœur que le concept porté par le Refuge de la tanière soit une réussite !
Stylianos Lydia
22 novembre 2020 à 9h49
Ça fait chaud au coeur de lire ça on ne voit habituellement que cruauté et maltraitance bravo et merci pour vos pensionnaires qui pourront enfin vivre en toute tranquillité, je vous souhaite une grande réussite et beaucoup de bonheur j’aimerais tellement que tel endroit puisse couvrir dans mons secteur les Pyrénées-orientales. Amicalement.