Education des adultesNuméro 3Florence Dellerie : « il est essentiel de s’éduquer à la pensée critique »

Amandine Zirah15 avril 20215 min

Autrice et illustratrice scientifique, Florence Dellerie est spécialisée dans les illustrations naturalistes (zoologie, botanique, mycologie et paléontologie). Militante en faveur des intérêts des individus sentients (humains ou pas), la jeune femme rappelle l’importance au quotidien du développement de la pensée critique.

En quoi consiste le métier d’illustratrice scientifique ? Comment cette idée a-t-elle immergé et quelles sont les aptitudes requises pour évoluer dans ce domaine ?

Le métier d’illustratrice scientifique consiste à proposer au public des représentations réalistes et détaillées de certaines entités relatives aux sciences naturelles (zoologie, botanique, paléontologie, mycologie). Plusieurs maisons d’édition, associations, réserves naturelles et institutions font appel à moi pour réaliser des guides nature, des guides d’identification ou des panneaux d’informations destinés au public. Je travaille aussi avec la presse pour des magazines destinés aux enfants dans lesquels se trouvent des informations de vulgarisation sur la nature, les animaux, les végétaux.

Enfant, j’ai toujours dessiné et je pense avoir beaucoup été influencée par ma mère qui est artiste-peintre. Nous vivions à la campagne entourée d’animaux et je me baladais souvent dans les forêts en jouant l’exploratrice. J’avais toujours envie de décrire les éléments autour de moi. Puis, j’ai lu beaucoup de livres sur les animaux dans lesquels les illustrations étaient très belles. Je rêvais de faire des dessins aussi jolis, c’est pourquoi j’en ai fait mon métier. Pour autant, les études que j’ai faites n’ont aucun rapport avec l’illustration naturaliste. J’ai suivi un cursus universitaire en Sciences de l’information et de la communication. Je suis autodidacte.

Vous êtes également autrice. Quels sont les thèmes évoqués dans vos articles ?

Je suis autrice de beaucoup de contenus de vulgarisation relatifs à l’éthique animale et à la promotion de l’esprit critique. En plus de concevoir des fiches synthétiques, j’écris des articles sur mon blog Médiapart, sur mon site « Questions animalistes » mais aussi pour une revue en ligne contre le spécisme « L’Amorce ». J’évoque également les droits humains sous forme de petites fiches de synthèse.

Militante en faveur des intérêts des individus sentients (humains ou pas), vous êtes cofondatrice du projet « Méduses ». En quoi consiste-t-il ?

Le projet Méduse a vu le jour en 2019. C’est un mouvement qui vise à promouvoir la prise en compte des intérêts de tous les êtres sentients, ceux capables de ressentir de la souffrance ou du plaisir. Je parle des humains mais aussi des animaux exploités dans les élevages ou dans bien d’autres domaines comme les loisirs ou la mode. L’idée est de se regrouper avec des personnes partageant les mêmes valeurs d’altruisme et de trouver des solutions. A titre d’exemple, à l’occasion de la Journée mondiale pour la fin de la pêche le 27 mars dernier, nous avons créé des visuels à partir d’extraits d’études scientifiques qui démontrent que les poissons sont capables de ressentir la douleur.

En parallèle, on visibilise des actions de solidarité. On se regroupe aussi pour se soutenir en tant que militant car ce n’est pas tous les jours facile. Puis, nous nous formons mutuellement pour être capables d’argumenter correctement et d’avoir de bonnes informations afin de ne pas desservir le discours. Il faut aussi être bienveillant, prendre en compte les facteurs déterminants et les états émotionnels des personnes qui ne partagent pas forcément notre avis.

Vous tenez régulièrement des conférences lors desquelles vous mettez en lumière l’importance de développer l’esprit critique. Transmettre vos acquis est-il important pour vous ?

Complètement. Il y a des déficits d’informations dans de nombreux domaines notamment concernant l’élevage des animaux ou leur abattage. Si je suis en mesure de donner une information peu accessible au grand public, je le fais. J’aime aussi échanger avec les autres pour qu’ils prennent du recul sur certaines situations et comprennent les raisons pour lesquelles ils pensent comme ils le font. C’est important de comprendre comment fonctionne notre cerveau et quels sont les facteurs qui peuvent nous influencer. Nous sommes confrontés à beaucoup d’éléments publicitaires, à de nombreux discours politiques et militants parfois un peu trompeurs. Il faut savoir dégager le vrai du faux.

Votre approche se veut « sceptique, radicale et bienveillante » pour reprendre vos mots. Quels sont, selon vous, les clés d’une bonne compréhension ?

Il est essentiel de se former soi-même, de s’éduquer à la pensée critique, de découvrir les outils permettant d’avoir une meilleure méthodologie de réflexion. Pour exemple, nous devons connaître les biais cognitifs dont nous pouvons être victimes. C’est très schématique mais nous pouvons avoir des réflexes, des raccourcis de pensées qui ne sont pas forcément pertinents. Tout cela permet d’éviter les fake news et les discours trompeurs.

Beaucoup de clichés se sont construits avec le temps chez les adultes. Les enfants, eux, ont une certaine naïveté. Ils ont moins de recul. En revanche, ils ont beaucoup moins de tabous et de stéréotypes. Il est donc plus facile de leur expliquer les choses. L’information ne sera pas rejetée aussi facilement qu’elle l’est généralement chez les adultes.

Quels sont vos projets à court et à long terme ?

Je travaille actuellement sur la réalisation d’une centaine d’illustrations mycologiques, des dessins qui permettront de reconnaître les champignons espèce par espèce et d’éviter ainsi de se tromper lors des récoltes. Les planches sont nombreuses, elles doivent être très détaillées et réalistes pour éviter les risques d’erreurs.

Je compte évidemment poursuivre mes autres activités et aussi les coloriages. C’est un deuxième aspect de mon travail qui est un peu plus décalé par rapport à la stricte illustration scientifique. Je travaille avec des maisons d’édition qui développent des coloriages d’art thérapie. Du coup, je mets mes compétences au service de ces dessins. Les compositions sont plus fantaisistes et originales.  

Florence Dellerie

Liens vers le travail de Florence Dellerie :

https://questionsanimalistes.com/

https://blogs.mediapart.fr/florence-dellerie/blog

https://www.facebook.com/florencedellerieQA

https://twitter.com/FlorenceDell

https://www.instagram.com/florencedellerie/

Amandine Zirah
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Rédactrice freelance

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