Engagé auprès des animaux, le sculpteur-plasticien Cyril Maccioni s’est fait une place de choix dans le monde de l’art contemporain. Au travers de ses œuvres, il incite le public à la réflexion et l’invite à se plonger dans une réalité bien trop oubliée, la maltraitance animale.
Cela fait plusieurs années que vous modelez des matériaux pour en faire émerger des œuvres. Comment l’idée de devenir sculpteur a-t-elle germé ?
J’ai un parcours professionnel que je qualifierais d’assez atypique. J’ai été de cursus en cursus. Je suis sorti de la fac avec un niveau bac+5 sans pour autant avoir une idée précise de ce que je ferai sur le marché du travail. Après avoir enchaîné des petits boulots, j’ai eu l’opportunité, à l’âge de 25 ans, d’intégrer des agences de mannequins. J’ai ensuite travaillé dans l’hôtellerie et c’est seulement au début des années 2013/2014 que je suis entré dans le monde de la création. J’ai été designer maker et c’est en travaillant avec de nouveaux matériaux que j’ai ressenti le besoin de passer à la sculpture. Je n’ai fait qu’un avec toutes mes passions.
Vous avez été choisi comme ambassadeur au salon Nice Art Expo pour la première fois. A cette occasion, vous avez exposé une œuvre monumentale, un aigle géant, symbole de la commune. Êtes-vous fier d’y avoir participé et quel est le message que vous avez souhaité faire passer ?
Il n’y avait plus d’évènement artistique à Nice de cet ordre depuis les attentats de juillet 2016. J’ai pensé à l’aigle pour matérialiser ce retour, l’envol symbolise les armoiries de la ville de Nice. L’idée était de présenter un projet qui fasse référence à un renouveau positif. C’est un message de foi, d’espoir. J’ai voulu véhiculer de bonnes ondes à travers une œuvre qui a du sens.
Tout s’est très bien passé. Nous avons eu une forte mobilisation de la presse au sujet de ma participation. Je suis vraiment ravi. Mon objectif premier était la communication. Le second, était de mettre sur pied des projets de collaboration et de création d’œuvres et c’est en très bonne voie. Nous avons fait également quelques ventes donc c’est une totale réussite.
Quel regard portez-vous aujourd’hui sur la condition animale ?
Je suis d’un tempérament à ne jamais laisser tomber et bien que je sois de nature positive, je suis déçu car le constat n’est pas très glorieux pour l’instant. Lorsque l’on se penche sur le dernier rapport du GIEC, il n’y a pas de quoi se réjouir. Les animaux sont les victimes du réchauffement climatique. La montée des eaux et la réduction de leur territoire est terrifiant. C’est d’ailleurs ce qui a poussé les ours polaires à migrer depuis plusieurs années. Certaines espèces, qui n’existaient pas auparavant, sont apparues comme le pizzly, un croisement entre l’ours polaire et le grizzly. Elles vivaient dans des territoires distants mais ont été amenées à se rapprocher.
Au-delà de l’impact du changement climatique sur les espèces animales, j’aborde également, dans mon travail, le thème de la maltraitance et notamment de la corrida en mettant en avant un taureau rouge, couleur sang. Ma démarche a évolué ces dernières années, je fais passer différents messages. De nos jours, on ne peut plus se contenter de faire les mêmes œuvres pendant 30 ans.
Cette cause va-t-elle influencer votre choix pour la présidentielle ?
Je suis apolitique. Je suis intimement convaincu que la solution ne se trouve pas au niveau politique mais entre les mains de chacun. Nous n’avons pas besoin d’un élu pour nous dicter notre façon d’agir. Je trouve même cela idiot que nous puissions nous reposer sur une seule et même personne qui ne tiendra pas ses promesses de campagne.
Une seule personne ne changera rien, ce sont les 7 milliards d’humains qui pourront le faire. Par exemple, si nous décidons aujourd’hui de ne plus manger de viande, demain il n’y aura plus d’abattage. Cela dépend de nous. Certaines personnes fondent beaucoup d’espoir sur les élus et je peux le comprendre mais j’ai tellement vu de promesses non tenues que j’ai arrêté de leur faire confiance.
Est-ce en Corse, votre terre natale, que vous puisez votre inspiration ?
J’ai toujours vécu entouré de nature. Nous avons la chance sur l’île d’avoir des espèces endémiques. Ça m’a toujours profondément inspiré même si les animaux que je créés ne sont pas tous d’ici. J’ai pour démarche artistique de mettre en avant les animaux ciblés par la sixième extinction de masse et ceux maltraités. Nous n’agissons pas assez. Cette cause me touche et c’est pour cela que j’ai décidé de les montrer sous un aspect différent. J’ai choisi de les représenter d’une seule et même couleur, le noir, car elle fait référence au deuil. J’adore jouer avec la réflexion de la couleur et le noir se prête à ce jeu-là. Je réalise également ces animaux sans leurs yeux pour inciter le public à la réflexion. J’aime dire qu’ils ont fait le sacrifice de leurs yeux afin d’exhorter les humains à ouvrir les yeux.
Au départ, je sculptais sur du bois, du béton et de l’acier mais j’ai malheureusement eu de gros problèmes de santé qui m’ont conduit à ne plus pouvoir soulever des charges trop lourdes. Depuis, j’utilise de la résine et des matériaux composites. Des matériaux très légers qui permettent de réaliser des œuvres monumentales pour un poids relativement réduit.
Avez-vous d’autres projets pour sensibiliser le public autour de la protection animale ?
J’ai des idées, peut-être même un peu trop. J’ai tendance à partir dans tous les sens, c’est pour cela que je dois me canaliser. L’idée est de faire évoluer ma démarche tout en gardant une cohérence. Mes œuvres doivent continuer d’interpeller et de faire réfléchir. J’ai différents projets mais je suis une personne qui ne met pas la charrue avant les bœufs.
Amandine Zirah
Rédactrice freelance