Numéro 5Animaux sauvagesPourquoi préserver la faune sauvage ne signifie pas la surprotéger ?

Trisk’ailes15 octobre 20216 min

Une conscience environnementale croissante

Les associations de préservation de la faune sauvage constatent une prise de conscience écologique et une volonté grandissante d’agir. Alors que 28 % des espèces sauvages sont menacées d’extinction dans le monde, on se sent concerné par la cause animale.

Ainsi, chaque année, les centres de soins pour la faune sauvage voient le nombre d’admissions d’animaux grimper de 30 %. Car, si la vision d’un écureuil mort sur la route reste banale – on compte 220 millions d’animaux morts chaque année suite à une collision sur les routes européennes – elle provoque davantage l’émotion et l’indignation.

Mais toute initiative, aussi bienveillante soit-elle, doit être encadrée, même dans l’urgence.

Le revers d’une communication efficace

Ainsi, Volée de Piafs – Trisk’ailes reçoit autant de sollicitations téléphoniques concernant des pigeons que des goélands, qui sont protégés par le code de l’Environnement. C’est un combat de l’association que de prôner l’antispécisme. Néanmoins, un constat alarmant est ressorti de l’analyse des fichiers de suivi des sollicitations. Environ 36 % des animaux pris en charge en centre de soins auraient tout intérêt à ne pas y séjourner. L’intervention humaine, contrairement à ce que l’on pense, n’est pas systématiquement de rigueur. Un faon trouvé tout seul au beau milieu d’un pré n’est pas forcément en détresse, et venir le déranger en pensant le sauver peut lui coûter très cher. Les jeunes mammifères – faons, levreaux, lapereaux – une fois touchés par l’humain, risquent de se voir rejetés par leur propre mère à cause du danger que représente notre odeur.

Panneau pédagogique de l’exposition photo associative « Le Bon geste » © Volée de Piafs – Trisk’ailes (2020)

Les problèmes liés à l’imprégnation

D’autres conséquences néfastes découlent de l’envie d’aider. Les centres de soins mettent régulièrement en lumière le problème de la familiarisation des animaux en détresse. Parce que le premier réflexe majoritaire est de capturer l’animal et de l’amener chez soi. Puis on le présente aux enfants, on lui parle, et son s’y attache. Or, si la loi interdit le fait de transporter un animal hors de son milieu naturel et de le garder en captivité, c’est pour préserver le caractère sauvage de la faune – donc la faune sauvage elle-même – et non pas pour nous empêcher de l’apprécier.

Volée de Piafs – Trisk’ailes alerte sur ces dérives, notamment à travers un article expliquant en 5 points pourquoi détenir un animal sauvage chez soi est contre-productif. Bien souvent, la captivité prolongée pratiquée par des particuliers engendre  l’imprégnation de l’animal. L’imprégnation est un trouble du comportement. L’animal s’approprie les codes comportementaux des humains, et donc ne les craint plus, mais surtout, il devient incapable de vivre dans la nature avec ses congénères. Pour cause, un animal imprégné a perdu tout instinct naturel et, dans la plupart des cas, il n’a jamais appris ni à se nourrir ni à communiquer ni à se reproduire ni à se défendre… Le Groupement Ornithologique du Refuge Nord Alsace parle de handicap irréversible. C’est une conséquence très grave pourtant initiée par des personnes avec de bonnes intentions de départ, celles de sauver un animal.

En résumé, un animal sauvage imprégné est voué à une mort certaine dans son milieu naturel ou condamné à une vie en captivité qu’il n’a pas choisie et qu’il est illégal de lui imposer.

Et si nourrir les hérissons les conduisait plus vite à leur perte ?

Le hérisson est le parfait exemple de l’animal sauvage menacé de toutes parts. Les causes principales de sa mort sont les pesticides (ceux provenant des parcelles agricoles mais aussi ceux de nos jardins et potagers privés), la collision sur la route, la disparition des prairies et des haies, les accidents tels que la noyade dans nos piscines, le piégeage dans nos clôtures, les blessures infligées par nos outils de jardinage… Résultat, le hérisson d’Europe disparaîtra d’ici 2030 selon les scientifiques.

Étant une sentinelle de l’état de santé de notre environnement, le hérisson a fait l’objet d’une communication grandissante. Les articles de blog et de presse et les conseils en tout genre ont fleuri sur la toile, jusqu’à devenir contradictoires entre eux. Si l’objectif premier est de secourir l’espèce, il n’est pas rare que les conséquences soient négatives.

La plupart des centres de soins français ont vu la population de hérissons en détresse augmenter dans leur structure, faisant de lui l’espèce la plus accueillie devant le goéland argenté à Volée de Piafs – Trisk’ailes (plus de 600 individus en 2019). L’association CHENE a constaté le même problème. Voyant paraître une baisse importante de l’immunité chez le hérisson, elle participe à une étude concernant les causes exactes de leur mort. Les pesticides sont en première ligne, mais l’association n’exclue pas une mauvaise alimentation. L’ingestion régulière de croquettes pour chat pourrait avoir un impact sur leur métabolisme. Elle est en tout cas le moteur de leur prise de poids anormale. Les ingrédients constituant l’alimentation des animaux domestiques sont inappropriés pour les animaux sauvages.

La soigneuse capacitaire relâchant un cygne tuberculé accueilli au centre de soins © Volée de Piafs – Trisk’ailes (2018)

La première chose à faire : analyser la situation

Pour éviter les erreurs de jugement, il vaut mieux ne pas agir dans la précipitation.

La première chose à faire face à un animal sauvage, c’est analyser la situation. L’animal est-il (vraiment) en danger ? A-t-il l’air blessé ou malade ? Est-il abandonné ? A quelle espèce semble-t-il appartenir ? Chaque situation est unique et mérite observation, car l’intervention doit être réfléchie et adaptée.

Deuxième chose à faire, contacter des professionnels pour exposer la situation. Le centre de soins est l’interlocuteur à privilégier, car il est composé d’une équipe expérimentée, dont c’est le quotidien (annuaire des centres de soins). Autrement, il est possible de contacter l’Office Français de la Biodiversité, un vétérinaire, voire la mairie. Ces instances redirigeront vers un centre de soins à proximité qui saura donner les conseils appropriés avant toute intervention.

S’il ne viendrait jamais à l’idée de quelqu’un de tenter de soigner une plaie profonde à un inconnu sans en avoir l’expérience, il en va de même pour la faune sauvage. Ne vous improvisez pas soigneur animalier.


Contacts Volée de Piafs – Trisk’ailes

Faune sauvage en détresse : 06 08 98 42 36
Mail : contact@volee-de-piafs.fr
Administration : 07 86 47 86 78

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