Numéro 7SantéAntibiotiques pour l’homme ou pour l’animal, comment arbitrer ?

L’antibiorésistance, un enjeu de santé publique majeur

« L’antibiorésistance est la capacité des bactéries à résister aux antibiotiques. Elle est la conséquence de l’usage excessif des antibiotiques en médecine humaine et vétérinaire. Ces bactéries résistantes peuvent se transmettre de l’animal vers l’Homme ou inversement. Elles peuvent remettre en question l’efficacité de certains antibiotiques et entraîner des difficultés pour soigner certaines infections » (JY Madec ANSES – Actualité 18/11/21)

Même si la prescription responsable des antibiotiques limite les risques de résistance, les récents débats ont mis l’accent sur les antibiotiques « critiques » qui devaient être exclus du soin des animaux pour être réservés à l’homme.

Ou en sommes-nous de ce phénomène, et comment maintenir l’effort ?

Une prescription de plus en plus responsable quantitativement et qualitativement

Les vétérinaires ont montré qu’ils prenaient très au sérieux la prescription prudente des antibiotiques, puisqu’on a enregistré une baisse de 45% des usages ces 9 dernières années. C’est le résultat de plus d’une décennie d’efforts dans le secteur de la santé animale pour accroître la prévention des maladies par la vaccination, la nutrition, l’amélioration des pratiques d’hygiène et de biosécurité. Mais il ne faut pas oublier que les animaux peuvent tomber malades et nécessiter un traitement antibiotique après diagnostic et prescription par un vétérinaire.

Ce qui est intéressant, au-delà des quantités, c’est la baisse de l’exposition des animaux selon le critère de l’ALEA (Animal Level of Exposure to Antimicrobials) qui est désormais un indicateur de l’Insee pour le suivi national des objectifs de développement durable – Janvier 2022.

« En 2020, l’exposition des animaux aux antibiotiques a atteint son plus bas niveau depuis 1999. Après une forte baisse de l’ALEA entre 2011 et 2016, une relative stabilisation de l’exposition animale est observée sur les quatre dernières années pour la majorité des familles d’antibiotiques, à l’exception des Tétracyclines et des Polypeptides » (Source ANSES)

Cette baisse est d’autant plus nette en comparaison des usages en médecine humaine (source LMV)

Un contexte Européen contraignant pour les antibiotiques les plus sensibles

Le règlement (UE) 2019/6 relatif aux médicaments vétérinaires est entré en application partout en Europe le 28 janvier 2022. Il comporte des mesures pour lutter contre la résistance aux antimicrobiens et promouvoir une utilisation plus prudente et responsable des médicaments antimicrobiens chez les animaux.

Le règlement européen rappelle que « les médicaments antimicrobiens ne doivent pas être administrés de façon systématique, ni utilisés pour compenser de mauvaises conditions d’hygiène, des conditions d’élevage inappropriées ou un manque de soins ou pour compenser une mauvaise gestion de l’exploitation ».

Un article du règlement dispose qu’il convient de réserver certains médicaments antimicrobiens au traitement de certaines infections chez l’homme, en vue de mieux préserver leur efficacité en médecine humaine et de soutenir la lutte contre la résistance aux antimicrobiens. Une liste de ces antibiotiques les plus critiques a été proposée par les scientifiques de l’Agence européenne du médicament (EMA) et est en cours d’examen par la Commission Européenne.

Chaque antimicrobien de la liste a été évalué individuellement selon les trois critères : importance pour la santé humaine, potentiel de transfert de résistance de l’animal à l’homme et importance pour la santé animale. Les experts de l’EMA (provenant de la santé humaine et de la santé animale) ont justifié pourquoi des antimicrobiens spécifiques figurent sur la liste réservée à l’usage humain uniquement. Ces antimicrobiens réservés seront totalement interdits chez les animaux.

Cette analyse est un exemple d’une approche « Une seule santé », recherchant le bon équilibre entre la protection de la santé humaine et animale tout en donnant la priorité à la santé publique, en prévoyant la possibilité de réserver un antimicrobien à l’usage humain s’il existe un intérêt supérieur de santé publique.

Cet avis scientifique pour la désignation d’antimicrobiens à réserver au traitement de certaines infections chez l’homme, fera progresser la lutte contre la résistance aux antimicrobiens dans l’Union et au niveau mondial en faisant cohabiter les 2 médecines humaine et animale.

Sources :

anses.fr/fr/system/files/ANMV-Ra-Antibiotiques2020.pdf

anses.fr/fr/system/files/LABO-Ra-Resapath2020.pdf

Jean-Louis Hunault
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Président du SIMV

Marie-Anne Barthelemy
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Secrétaire Générale du SIMV

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