ActualitésAnimaux sauvagesLa justice annule la chasse de 3 oiseaux menacés dans les Antilles !

ASPAS14 janvier 20223 min

Chose rare en matière de chasse, le juge a retenu le principe de précaution pour justifier ses décisions, ce qui est une excellente nouvelle. Le bon sens voudrait évidemment que tout acte de chasse soit immédiatement suspendu, lorsqu’il est avéré qu’une espèce est en mauvais état de conservation, mais ça c’est sans compter l’influence du puissant lobby chasse… 

Dans le cas présent, ces deux victoires à 15 jours d’intervalle interviennent dans un contexte favorable, après des années de combat judiciaire devant ce même Tribunal en faveur de deux autres oiseaux en mauvais état de conservation, et pour lesquels nous avons déjà obtenu gain de cause : la Grive à pattes jaunes et le Pigeon à couronne blanche. 

Les arguments retenus par le juge

Concernant la Barge hudsonienne, le juge a motivé sa décision du 30 décembre par le fait qu’elle figure sur la liste rouge des espèces menacées en France (UICN) où elle est classée « vulnérable », et qu’il n’existe aucune évaluation certaine de la population locale et de sa dynamique en Guadeloupe (on estime à moins de 250 le nombre d’individus matures par an). Par ailleurs, le conseil scientifique régional du patrimoine naturel de la Guadeloupe (CSRPN) a rendu un avis favorable à la protection pour cette espèce (avis n° 2016/02 du 10 mars 2016).

La Colombe rouviolette, quant à elle, est classée dans la catégorie « quasi menacée » sur la liste rouge des espèces menacées en France (UICN), c’est-à-dire qu’elle se situe proche du seuil des espèces menacées si des mesures de conservation spécifiques ne sont pas prises. Comme pour la barge, il n’existe aucune évaluation certaine de la population locale et de sa dynamique en Guadeloupe, et le CSRPN a également rendu un avis favorable à la protection pour cette espèce. De plus, la période de chasse autorisée couvre en partie la période de reproduction et de nidification de l’espèce (février à août), ainsi que la période de dépendance des jeunes individus, qui peut s’étendre jusqu’à mi-septembre, selon les observations scientifiques disponibles.

Ce dernier argument a également été retenu pour le Pigeon à cou rouge, sachant que sa période de reproduction et de nidification s’étend de mars à octobre, et que la période de dépendance des jeunes individus peut même s’étendre jusqu’à novembre, selon certaines observations.

Par ailleurs, aucune étude scientifique ne permet d’évaluer la population actuelle de pigeons à cou rouge alors que cette espèce est rare, en déclin, ou à tout le moins peu commune. 

Enfin, le juge a même retenu qu’il « apparait particulièrement peu crédible qu’un contrôle soit réellement et efficacement exercé sur les prélèvements effectués quotidiennement par les chasseurs ». Ce faisant, il relève l’inutilité des quotas fixés par le préfet, insuffisants et surtout dont le respect est invérifiable en pratique.

Comme pour le Pigeon à couronne blanche et la Grive à pieds jaunes, il est à espérer que le préfet finisse par écouter la voix des scientifiques et des associations de protection de la nature pour épargner ces trois autres espèces en déclin. Nous serons en tout cas très vigilants pour la suite, nous attendons l’inscription de ces oiseaux sur la liste des espèces protégées, et n’hésiterons pas à saisir à nouveau le tribunal si nécessaire ! 

Rappelons, pour conclure, que nos associations avaient également fait suspendre, en juillet 2021, la chasse de la Barge hudsonienne et du Pigeon à cou rouge dans l’île voisine de la Martinique, mais aussi d’autres espèces menacées (Pigeon à couronne blanche, Courlis corlieu, Pluvier doré, Pluvier argenté, Moqueur corossol, Bécassin roux).

Il est grand temps que le ministère en charge de la biodiversité accorde à toutes ces espèces le statut qu’elles méritent, celui d’espèces légalement protégées !

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