Animaux domestiquesNuméro 3Hitler était l’ennemi des humains et des animaux

Arno Klarsfeld15 avril 20213 min

Extrait d’ Ames et Animaux, Fayard – 2021 (p. 191 à 193)

« Lorsque Hitler, en avril 1945, face à l’avance des troupes soviétiques, descendit pour se confiner dans son bunker sous le jardin de la chancellerie du Reich, avec son état-major, son staff, de hauts dignitaires nazis et Eva Braun, il prit avec lui son berger allemand femelle, Blondi. Blondi lui avait été offerte par son secrétaire particulier, l’infâme Martin Bormann, qui était aussi chef de la chancellerie du parti nazi. Blondi, en tant que chiot en 1941, aimait son maître quand il dominait l’Europe et ses millions de kilomètres carrés, s’apprêtant à fondre sur la Russie ; elle l’aimait toujours, sans doute, à l’âge adulte, quand il n’était plus maître que des quelques mètres carrés de son bunker en avril 1945. Sur plusieurs photos d’archives, on peut voir Hitler avec Blondi : Blondi assise sur ses pattes arrière, attendant un morceau de sucre de la main de Hitler, entouré de Bormann et du maréchal Keitel ; Hitler et Blondi au soleil sur la terrasse du Berghof avec Eva Braun; Hitler jetant un bâton pour que Blondi le rapporte, etc.

Ces photos, prises par Hoffmann, le photographe attitré de Hitler, étaient vendues aux Allemands, accréditant l’idée d’un Hitler ami des animaux. Hitler fit empoisonner Blondi quelques heures avant son suicide. Il fit essayer sur elle les capsules de cyanure qui devaient servir à son suicide et à celui d’Eva Braun, craignant que Himmler, par traîtrise, ne lui ait fourni des capsules inefficaces. Peut- être Hitler agit-il ainsi craignant que Blondi fut torturée si elle était tombée entre les mains des soldats soviétiques, peut-être ne voulait-il pas qu’elle lui survive, ou au régime nazi ? Goebbels, dans le bunker, fit empoisonner ses six enfants qu’il aimait tendrement, comme en témoigne la lecture de son journal. Peut-être que leur amour du nazisme était supérieur à l’amour qu’ils portaient a leurs enfants ou à leur animal… Difficile à savoir.

C’est de la psychologie spéculative. Cependant, certains soutiennent que le régime nazi a œuvré en matière de défense animale. Rappelons les vérités suivantes :

– Une loi du Reich de 1941 interdit aux Juifs de posséder des animaux et, sous peine de sanctions sévères, les oblige à les amener chez le vétérinaire à des fins d’euthanasie.

Victor Klemperer témoigne dans son livre La Langue du IIIe Reich : « On nous a enlevé, puis tué nos animaux domestiques, chats, chiens et même canaris : loin d’être des cas isolés, des turpitudes sporadiques, il s’agissait d’une intervention officielle et  systématique et c’est une des cruautés dont aucun procès de Nuremberg ne rend compte. »

– Hitler ne chassait pas, mais il laissait son protégé, le brutal et sanguinaire Erich Koch, commissaire du Reich en Ukraine, s’attribuer une réserve personnelle de chasse de 50 000 hectares en faisant évacuer et massacrer la population vivant sur place. Il laissait également Göring organiser de vastes parties de chasse sur son domaine a Carinhall ou encourageait Ribbentrop, son ministre des Affaires étrangeres, à aller chasser avec Ciano, le ministre des Affaires étrangeres de Mussolini, et son gendre.

– Hitler n’est pas devenu végétarien par amour des animaux, mais il l’est devenu en 1932 quand il a commencé à souffrir de problèmes gastriques.

– Des millions de chevaux allemands et russes sont morts sur le front russe, souvent dévorés par la troupe affamée, sans que l’histoire ou les témoins aient retenu la moindre émotion du Führer à leur égard.

– Une loi sur la vivisection fut votée des avril 1933 mais elle ne fut jamais respectée et aux expérimentations sur les animaux vinrent s’ajouter quelques années plus tard des expérimentations sur les hommes, femmes et enfants dans de nombreux camps de concentration.

– Une des premières lois votées par le régime nazi fut la loi contre l’abattage rituel. Cette dernière fut appliquée, mais elle ne concernait que les Juifs.

– Quant à l’amour de Hitler pour Blondi, « une chienne remarquable du point de vue de la race », selon les mots du Führer, Goebbels témoigne que la maître était surtout fier qu’elle « n’obéisse qu’a lui ». On aime un animal pour ce qu’il est et non pour le pouvoir dont on dispose sur lui, c’est du moins mon point de vue. Quant à ses nuits à la Wolfsschanze, « la Taniere du Loup », le QG de campagne de Hitler durant la première partie de la campagne de Russie, Blondi les passait non pas sur le lit du Führer, mais dans une cage… »

Ames et Animaux, Fayard – 2021

https://www.fayard.fr/documents-temoignages/ames-et-animaux-9782213718019

Arno Klarsfeld
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