Animaux domestiquesNuméro 2Gestion éthique des chats errants en Espagne

Agnès Dufau15 janvier 202125 min

Depuis une quinzaine d’années, la gestion des populations de chats errants – ceux que l’on qualifie en France de chats « libres »-  constitue un des enjeux majeurs  des politiques publiques de protection des animaux en Espagne.

Les avancées concernant la gestion éthique des colonies de chats ont été notables, et bien que des écueils subsistent, 2021 devrait être l’année de l’officialisation de la méthode CER (« Capturar-Esterilizar-Retornar », traduction de l’anglais TNR « Trap-Neuter-Release ») au niveau national.

En effet, pour la première fois une loi nationale de protection des animaux de compagnie sera présentée par la Direction Générale des Droits des Animaux, crée en février dernier par le gouvernement espagnol.

Mais d’où viennent tous ces chats ?

Les populations de chats qui survivent grâce à la charité des uns et malgré la cruauté des autres proviennent de l’irresponsabilité des personnes. Chaque année une étude publiée par la Fondation Affinity donne une idée de la dimension du problème et  de l’implication des associations de protection des animaux dans la gestion des colonies de chats.  

Dans son dernier rapport la Fondation Affinity annonce que plus de 123 000 chats ont été recueillis par les associations et les municipalités en 2019, un chiffre en constante augmentation. Seuls 4% des chats recueillis étaient  identifiés (contre 28% des chiens). Il faut savoir que l’identification des chats dépend de la législation en vigueur dans chaque communauté autonome et n’est pas obligatoire sur tout le territoire espagnol.

De fait, les chats deviennent des animaux de plus en plus populaires en Espagne, notamment en milieu urbain. Cette popularité n’est pas toujours synonyme de responsabilité. De ce cocktail détonnant « popularité-irresponsabilité », couplé à une vraie méconnaissance de ce qu’est un chat provient les abandons et  la misère animale qui en résulte et à laquelle les associations tentent  de remédier inlassablement.

Dans son rapport de 2018, Affinity établissait que 51% des associations de protection des animaux espagnoles géraient des colonies de chats. La preuve, si cela était nécessaire, de l’importance du sujet…

Les fondements d’une gestion efficace de la population féline

« Le niveau de socialisation des chats, fruit de leur expérience de vie dans la période de socialisation des chatons, doit constituer la base pour établir une correcte gestion des chats trouvés dans la rue ». C’est le message que les associations espagnoles spécialisées dans la protection féline martèlent sans relâche.

Dans les grandes lignes, il est évident qu’un chat sociable qui se trouve dans la rue est un chat abandonné ou perdu. Sa prise en charge par l’administration ou les ONGs doit donc être orientée vers un retour dans son foyer ou son adoption.

Ceci n’est pas applicable aux chats nés dans la rue et qui ne tolèrent que très peu le contact avec les humains. Pour ces animaux, seule la gestion CER devrait être envisagée.

Cette gestion répond à plusieurs objectifs qui satisfont toutes les parties :

  • le contrôle de la population féline (stérilisations et suivi des colonies) ;
  • la protection des chats (identification; alimentation et suivi vétérinaire) ;
  • l’amélioration de la cohabitation chats-humains en réduisant notablement les nuisances provoquées par les colonies non contrôlées.

Barcelone, pionnière de la gestion éthique des chats

Depuis le début des années 2000, les choses ont beaucoup évoluées en Espagne et notamment à Barcelone,  grâce à l’union des ONG félines qui se regroupèrent en fédération pour négocier avec la mairie.

 En 2009, un centre municipal de stérilisation des chats errants a vu le jour. Cet équipement municipal a permis d’accélérer  la stérilisation des chats des 750 colonies recensées dans la ville.

En 2014 la mairie de Barcelone décida d’actualiser son règlement municipal (« Ordenanza »). La version antérieure (2003) était déphasée et ne correspondait plus aux attentes des citoyens. Un groupe de travail fut crée afin que toutes les associations de protection des animaux puissent contribuer à l’élaboration de ce qui est considéré comme un texte pionnier.

En effet, pour la première fois la définition du « gato feral » (chat errant) et celle de « colonie de chats » sont incluses dans ce texte. L’alimentation des chats dans l’espace public est formellement autorisée, dans le respect des bonnes pratiques de salubrité publique. Enfin, et surtout, la gestion éthique des colonies et la méthode CER devient la seule méthode de gestion pour les colonies, avec un financement municipal.

Depuis, la méthode CER a été insérée dans plusieurs lois de protection des animaux (entre autres la communauté de Madrid, la Galice, et Murcie), et de nombreux règlements municipaux ont aussi franchi le pas (notamment Málaga et Córdoba en Andalousie).

L’implication des vétérinaires

L’implication des vétérinaires espagnols aux côtés des associations a été fondamentale pour avancer. Elle leur a permis de comprendre les bases scientifiques d’une véritable gestion des populations, qui va bien au-delà de la stérilisation.

Le Groupe Espagnol de Médecine Féline (Gemfe-Avepa) a récemment publié son deuxième positionnement sur la gestion éthique des colonies, une aide précieuse pour toutes les personnes, vétérinaires, administrations qui veulent comprendre la base de la méthode CER. Les vétérinaires de Gemfe,  experts passionnés de médecine féline, participent très régulièrement aux conférences félines organisées par les associations espagnoles.

Les conférences, dont le but est de motiver et former le collectif des bénévoles, réunissent chaque année des centaines de personnes qui ont soif de mieux connaitre tous les aspects de la gestion des chats errants (correcte gestion des populations ; suivi sanitaire ; aspects juridiques). En 2021 plusieurs conférences sont déjà prévues.

Ces  évènements font avancer la cause des chats errants en Espagne, et ont contribué à changer le regard porté sur le collectif des défenseurs des chats.

Agnès Dufau
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Présidente de l’association FdCATS

2 commentaires

  • Christian Hazard

    3 mars 2024 à 8h49

    madame, monsieur
    Ce 28-2-2024 après un voyage au Maroc de plus d’un mois avec mon petit chat âgé d’à peine 1 mois au départ de Belgique, j’ai été obligé par la Guardia civil, d’abandonner mon chat aux portes du port.
    Nous, mon oncle et moi, déjà passé tout les contrôles de police et de douane à Nador et ce, sans problèmes.
    Ce n’est qu’au dernier contrôle que deux agents un peu zélés, ont refusé que le chat embarque faute de passeport.

    J’ai bien tenté d’expliquer qu’au départ, vu l’âge du chat, il était impossible que le chat soit pucé,

    Répondre

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