Je vous propose un texte particulièrement autobiographique pour cet article, le but n’est pas uniquement de vous raconter une histoire mais aussi et surtout de vous faire constater une évolution ; réfléchir à ce que cela peut évoquer chez vous en écho et peut être vous inciter à partager vos expériences avec nous pour explorer ce sujet de manière plus approfondie.
Je vais donc vous raconter mon histoire de manière chronologique et en expliquant ma vision de l’animal à chaque fois. C’est parti !
Milou
Milou a été mon premier chien de famille quand j’étais enfant, le premier dont j’ai un souvenir en tout cas. Chien de ferme au croisement improbable adopté par mes parents chez des particuliers en Mayenne, département où nous vivions alors. Une vie de liberté, un environnement idéal, des grands terrains au bord d’une rivière. Ce chien était présent dans ma vie sans que je me pose trop de questions sur ses besoins et sur le fait qu’ils soient assouvis ou non. Il était très connecté à mon frère et moi, une sorte de nounou à quatre pattes qui nous surveillait à sa façon. Etant donné mon jeune âge, je n’ai pas appris réellement quelque chose sur le comportement animal avec Milou à part la profonde bienveillance de cet animal envers nous et sa capacité à analyser les situations qui se présentaient. Il est resté parmi nous jusqu’à ses 17 ans.
Pépita
Pépita est entrée dans ma vie au début de la vingtaine. Une femelle Amstaff de quelques mois que j’ai récupérée dans des conditions difficiles, des cicatrices sur la tête et un peu ailleurs qui laissaient sous-entendre probablement quelques « rencontres forcées » avec des congénères de la même race et avec la même promesse d’une vie de misère à venir. Une chienne d’une gentillesse incroyable avec qui j’ai commencé la traction en longboard. Elle a eu un rôle très important dans ma vie malgré le peu de temps qu’elle a pu passer auprès de moi. A l’époque je ne le réalisais pas mais elle m’a permis d’assoir ma confiance en moi, le contraste entre son côté « pitbull qui fait peur » et la curiosité des gens face à une activité peu courante me plaisait énormément.
L’immaturité de la jeunesse et mon manque de connaissances sur le chien ont fait que ma méthode d’éducation avec elle n’était pas celle que j’ai aujourd’hui, beaucoup d’attention et de lien mais aussi trop de rigueur et de coercition. Je le regrette mais cette étape a certainement contribué à définir ce que je suis aujourd’hui. Malheureusement l’arrivée dans la précipitation dans un nouvel endroit, la proximité d’une route nationale, une porte que tout le monde croyait fermée mais qui ne l’était pas et sa fâcheuse tendance à s’approcher trop des voitures ont fait que notre vie commune n’a duré que deux années. Plusieurs mois de chagrin à la limite de la dépression ont suivi … j’ai alors appris à quel point un animal peut laisser un vide immense lorsqu’il n’est plus là.
Skud
Pour me réconforter, mes parents m’ont alors offert en cadeau de Noël une petite peluche jaune toute mignonne. Skud, Golden Retriever de 2 mois entrait alors à son tour dans ma vie. Skud était ce qu’on peut appeler un chien facile, bien qu’un peu craintif, j’ai le souvenir de n’avoir eu aucun mal à faire les apprentissages de base. A vrai dire je n’ai même pas le souvenir d’avoir eu besoin de lui apprendre quoique ce soit. Les aléas professionnels autant que personnels m’ont obligé à le laisser pendant de longues périodes chez mes parents, et il faut dire qu’il était bien plus à l’aise dans un grand jardin avec ses 2 autres copains chiens que dans un petit appartement. J’ai tenté de faire un peu de sport tracté avec lui mais il n’a jamais compris l’intérêt d’être loin de moi, donc il n’a jamais tiré. Une fois ma façon de communiquer avec lui plus adaptée à son côté craintif, c’est un chien qui m’a appris à jouer comme un chien, des sacrées bousculades et des roulades dans l’herbe mémorables… essayez donc vous verrez à quel point ça fait du bien. Même si le lien avec moi était bien réel, je pensais que le fait de n’être pas avec lui au quotidien me ferait moins souffrir de son absence une fois parti. Ça n’a pas été le cas et la tristesse m’a poussé à attendre quelques temps avant de retenter l’aventure de la compagnie canine.
Apache
Quelques années se passent et ma vie sans chien me convient… je suis alors en poste sur Paris, avec peu de temps libre et beaucoup de sorties. Pas le temps de penser à des balades en forêt ou d’autres bêtises du genre. Pourtant lorsque mon frère et sa compagne se décident à adopter un chien de la Réunion en SPA, quelques jours après la rencontre avec ce toutou des îles une idée s’est réveillée en moi, une idée fixe… Je voulais adopter un chien !
Après quelques recherches sur les sites de plusieurs refuges je tombe amoureux de la tête d’une jeune femelle croisée Husky de 4 mois. Me voilà parti pour 600 kilomètres aller-retour pour adopter Apache, elle a dormi paisiblement pendant tout le trajet du retour. Je m’étais orienté vers un Husky dans l’optique de me remettre au sport tracté, pour ça elle ne m’a pas déçu mais elle me réservait bien d’autres surprises. Au bout de quelques jours j’ai vite compris que j’étais dépassé, mes certitudes de l’époque ont volé en éclat face à cette tornade noire et blanche. Sans forcément être en conflit, je sentais bien que je ne répondais pas à ses besoins. Il me manquait quelque chose et j’avais l’impression que je « passais à côté » de ce chien en plus de générer chez elle un paquet de frustrations. J’ai alors décidé de me former autant que je pouvais et de comprendre au mieux cet individu complexe que j’avais en face de moi. D’une curiosité personnelle j’en suis arrivé à une évidence professionnelle : mon rôle était d’aider autant que possible les humains à comprendre leur chien et communiquer correctement avec lui.
Plus le temps passait et plus la certitude que le croisement Husky n’était pas le prédominant chez elle. Petit gabarit, oreilles tombantes, corps trapu et puissant … il s’est avéré que le Beagle était tout aussi présent que le Husky dans sa génétique. Apache a 6 ans aujourd’hui et elle continue d’être mon meilleur professeur. Elle m’a poussé à la remise en question et je lui en serai toujours reconnaissant.
Mango
Il y a 3 ans j’ai adopté Mango en refuge aussi, moins loin celui-là… 3 kilomètres seulement. Alors âgé de 4 ans et demi, Mango avait déjà connu la maltraitance, la rue à la suite d’une fugue, la fourrière puis 8 mois de refuge. Sur la fiche du refuge c’est un Husky croisé aussi mais croisé Malamute plutôt que Beagle avec un poids approchant le double de celui d’Apache. Plusieurs visites au refuge avant l’adoption pour m’assurer de la bonne entente avec mes proches, Apache et moi puis le voilà en route pour sa nouvelle maison et sa nouvelle vie. Avec Apache j’ai appris la persévérance et j’ai découvert la confiance qu’un animal peut nous offrir lorsqu’on répond correctement à ses besoins, avec Mango j’ai appris la patience et le calme. Ce gros bonhomme a mis presque 6 mois avant de me laisser le caresser sans crainte, il était un voleur professionnel et un videur de poubelles d’exception.
Sa progression m’impressionne, après bientôt trois années je me retrouve avec chien totalement différent. Il ne vole plus, ne se sauve pas même si le portail est ouvert, il rencontre plein de nouveaux copains malgré son indication « réactif congénères » affichée sur le box où il a vécu plusieurs mois et surtout il vient de lui-même demander du contact à des humains inconnus. Sa résilience est un exemple pour moi.
Et après ?
Plus j’évolue dans ma relation à l’animal et plus j’aime comprendre quel individu vivant j’ai en face de moi plutôt que de vouloir en façonner un qui me correspond à l’aide de techniques et de méthodes d’éducation ou de conditionnement. J’aime voir les chiens être eux-mêmes qu’ils aboient, qu’ils se roulent dans la terre, qu’ils creusent des trous ou qu’ils poursuivent des lapins.
Les chiens qui seront présents dans ma vie future ? Je ne les connais pas encore mais je sais qu’ils existeront et j’aurai à cœur de m’adapter à leurs besoins et leur personnalité pour leur permettre de m’offrir une relation unique.
J’espère que mon histoire vous a plu. Si c’est le cas n’hésitez pas à nous faire part de votre « histoire canine » et si un ou des chiens ont contribué à définir la personne que vous êtes aujourd’hui ?
Grégory Laurent
Coach en comportement canin pour ApacheDog