Numéro 4Animaux domestiquesLes autres victimes des corridas dont on ne parle jamais !

Thierry Hély15 juillet 202184 min

Au mois de juin dernier, un couple d’Istres, Paulette et Pierrick Macé, acceptent de répondre à 5 questions de la FLAC au sujet de leur souffrance psychologique lors des corridas sanglantes qui se déroulent dans leur ville. Dans un mail qu’il nous adresse, voici ce que l’on peut y lire : “depuis des années, les jours de feria à Istres représentent pour nous une réelle souffrance. De savoir les taureaux torturés lors de corridas, les larmes coulent inévitablement. Nous ne pouvons  même pas rester sur notre terrasse, entendant au loin la musique, synonyme de torture animale, les applaudissements et les cris des spectateurs. Nous nous sentons si mal et oppressés que pendant ce week-end, on ne peut sortir dans la ville. Nous éprouvons un sentiment de honte d’assister impuissants devant de telles atrocités. Pauvres taureaux, comment est-ce possible de leur faire vivre cela ? Quand retrouverons-nous à Istres et dans notre belle région, notre dignité humaine ?”.

Nous précisons que Paulette et Pierrick parrainent, avec un prélèvement mensuel, depuis 31 ans, des enfants en Haïti pour l’association “Un enfant par la main”, anciennement SOS  enfants sans frontières.

Pierrick est très engagé dans une association caritative “Istres Solidarité” qui vient au secours de très nombreuses familles nécessiteuses dans la ville d’Istres. Ce qu’ils ne supportent pas, c’est la souffrance humaine et animale et  ils œuvrent toujours dans ce sens dans la mesure de leurs petits moyens.

Pensez-vous être les seuls à éprouver cette souffrance dans votre ville ?

Il y a beaucoup de personnes qui éprouvent cette même souffrance dans notre ville mais elles ne savent pas quoi faire. Quand on pense que c’est seulement une petite minorité qui va voir ce spectacle ignoble…

Avez-vous déjà fait part de votre douleur et de votre indignation à la mairie d’Istres ?

Oui à la mairie d’Istres, sur un cahier de doléances et en appelant l’office du tourisme, la veille de la feria, pour leur exprimer notre indignation.

Saviez-vous que dans certaines villes taurines, pendant les ferias, des habitants prennent des anxiolytiques ou des somnifères, ne supportant pas la torture d’animaux pour s’amuser, à deux pas de chez eux ?   

Non, nous ne le savions pas. Mais cela ne nous étonne pas du tout. Nous concernant, à l’approche de la feria, difficulté à nous endormir. Le matin, au lever, grande tristesse, envie de pleurer. On redoute l’heure de la corrida, on sait qu’on va se sentir mal en entendant les hurlements de « joie » du public dans les arènes, alors qu’on est en train de torturer un taureau innocent. Comment peut-on infliger autant de souffrances atroces à un animal perdant son sang en le tuant pour le plaisir ? On a envie de crier « STOP, ARRETEZ CE MASSACRE, CETTE BARBARIE ! » Et nos larmes coulent. Qui êtes-vous pour nous faire subir cette douleur ? Etes-vous humains ? Avez-vous un cœur ? Dans quel monde vivez-vous ? » 

Avez-vous parmi vos proches et votre famille, des amateurs de corridas ? Et comment êtes-vous perçus ?

Heureusement que non. Mes parents provençaux (Paulette), bien estimés dans la ville, détestaient la corrida et chaque fois qu’elle se déroulait dans notre ville, ils savaient combien cela allait affecter notre famille. Nous nous soutenions. Et maintenant, mon mari et moi nous nous soutenons ainsi qu’avec nos enfants quand ils sont présents.

Que souhaitez-vous exprimer pour conclure cet interview ?

Combien de temps encore allons-nous supporter l’insupportable ? Si beaucoup de pays commencent à supprimer la corrida, on a grand espoir que cela se fasse aussi en France, dans le Sud. Faites vite une loi pour l’abolition de la corrida ! Un immense MERCI à toutes les associations qui œuvrent pour cette abolition. Elles nous redonnent de la dignité ! Que nos petits-enfants puissent, un jour, nous demander « c’était quoi, la corrida ? ».

Hélas, c’est un aspect douloureux trop peu connu de la corrida : le ressenti de toutes celles et ceux souffrant lors de corridas où des animaux sont torturés à mort juste pour le plaisir. Comme le dit si bien le psychiatre Jean-Paul Richier :  “La corrida porte atteinte à l’empathie et à l’éthique des innombrables personnes qui souffrent lors des corridas pendant les ferias”.  En 2015, porté par 30 Millions d’amis, membre de la FLAC, le classement de l’animal comme être sensible dans le Code civil est enfin inscrit définitivement au Parlement : 30millionsdamis.fr/actualites/article/8451-statut-juridique-les-animaux-reconnus-definitivement-comme-des-etres-sensibles-dans-le-code/

Et malgré cela, on continue à se rendre aux arènes, en famille, assister au supplice de taureaux beuglant de détresse et pissant le sang par les naseaux ! Et nous ne parlons pas des pauvres chevaux…  C’est tout de même incroyable ! De qui se moque-t-on ? On traite volontiers les anticorrida d’intolérants, mais les taurins et nos gouvernants font-ils preuve, eux, de tolérance pour tous les millions de gens, dans le sud de la France, et même au delà, qui souffrent en silence lors de ces supplices insupportables dignes d’une époque révolue et barbare ? Bien sûr que non…  

Encore merci à ce couple d’Istres pour son témoignage très touchant et si révélateur !

Thierry Hély
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Président de la FLAC

8 commentaires

  • Joël LUNEL

    9 août 2021 à 19h19

    Je demeure en Pays d’Arles, dans une petite commune où sont aussi pratiquées des corridas, cet ignoble spectacle ne peut trouver aucun justificatif. D’abord par les sévices cruels qu’on fait subir à un animal reconnu comme étant un être sensible, ensuite parce que cette torture est donnée en spectacle, banalisant et incitant ainsi à la cruauté.
    Comme les 3/4 des habitants de ma région, je suis opposé à la corrida, je trouve scandaleux que cet abject spectacle ne subsiste que grâce aux subventions publiques. Ainsi, une partie des impôts des contribuables servent, à leur insu, à financer la passion sadique de quelques-uns. Quelle démocratie en plus de la barbarie !

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  • Jean Poignet

    17 juillet 2021 à 10h01

    Emouvant témoignage qui interroge la société humaine en profondeur.
    Renforce notre conviction, et nous encourage à poursuivre sans relâche ce combat contre cette barbarie.

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  • Masson

    17 juillet 2021 à 7h49

    Votre poste est très bien écris je l’ai déjà partagé sur Facebook, oui personne ne pense à toutes ces personnes qui subissent dans toutes ces villes le massacre des taureaux à ciel ouvert, moi même je milite contre la corrida avec NO CORRIDA, en espérant que toutes ces orreures cessent !! ABOLITION DE LA CORRIDA !?

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  • Coriolan

    16 juillet 2021 à 21h52

    J’espère qu’ils ont aussi eu l’excellente idée d’adhérer à la FLAC. Plus largement, et pour répondre à Mme Mery, il ne suffira malheureusement pas d’évincer les maires complaisants, car les clubs taurins pourront toujours s’appuyer sur la loi autorisant les dérogations locales pour continuer d’imposer cette pratique barbare. Il faut supprimer, purement et simplement, toutes les exceptions “culturelles” et/ou “religieuses” au niveau du gouvernement. Mis à part le Parti Animaliste et l’Alliance Écologiste Indépendante qui sont animalistes, même les Verts sont seulement environnementalistes, les autres ne pensent qu’à préserver leur capital électoral en ménageant les susceptibilités des assassins taurins.
    – Yves Bonnardel et Axelle Playoust-Braure. Solidarité Animale. Défaire la société speciste. La Découverte.

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  • FUGIER

    16 juillet 2021 à 18h50

    magnifique témoignage,merci à tous.MERCI;

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  • sophie l

    16 juillet 2021 à 18h22

    Bonne initiative de la Flac que montrer cet aspect peu ou pas abordé habituellement.

    Un point intéressant est d’ encourager les gens à exprimer à leur municipalité leur désaccord et dégout comme le font Paulette et Pierrick qui évoquent le cahier de doléances de leur ville.
    Bon à savoir et je vais voir si ça existe vers chez moi.
    Pas toujours facile car concernant Ales par exemple, le maire ou un de ses services ne répondent jamais ( honteux) à une lettre anti corrida .

    Une petite action que beaucoup de protecteurs des animaux peuvent facilement faire: il existe partout des panneaux d’ affiche libre dans les communes: collons-y régulièrement des tracts AC ou autre information de la Cause animale!
    Je le fais dans mon village et parfois en ville quand je passe devant un de ces panneaux .
    Il suffit d ‘avoir toujours quelques tracts dans ses affaires et un rouleau d’ adhésif .

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  • Ghislaine Lecocq

    15 juillet 2021 à 20h03

    Trés bel article de Thierry Hély, qui révèle un aspect qu’on connait trés peu, car les personnes touchées n’osent même pas l’exprimer: la souffrance et la honte des habitants de villes taurines, obligés de subir les corridas dans leur ville, leur région. Bien que majoritaires en France (y compris dans les régions taurines) ils subissent cette ignominie devant une minorité violente, sûre de son bon droit, exactement comme dans les régions de chasse…
    STOP à la dictature taurine en France!

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  • Mery Arlette

    15 juillet 2021 à 13h31

    C’est que que j’ai ecrit au maire de la ville d’Arles sur le site de la mairie , de les voir , ces images horribles qui circulent nous font perdre le sommeil et nous provoquent des angoisses ! Pourtant j’habite le Nord de la France .
    Sur les réseaux sociaux plusieurs “amis” Facebook me confient avoir honte et être mal à l’aise et n’osent pas “avouer” vivre dans une ville taurine !? Et qu’ elles souffrent de savoir ces massacres commis dans les arènes de leur ville . Il faudrait mobiliser les jeunes à s’ inscrire sur les listes électorales pour voter contre ces maires . Les évincer au profit de maire qui organiseraient Des fêtes moins sanglantes et plus conviviales

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