Le Blaireau d’Europe est un mammifère indigène en France, omnivore, nocturne, qui vit en groupes sociaux dans des terriers complexes. Jusque dans les années 1980, quand l’espèce était encore classée « nuisible », diverses formes de persécutions dont le gazage de ses terriers avaient entraîné une raréfaction des blaireaux. Depuis l’interdiction du gazage, l’espèce semble avoir reconstitué une partie de ses effectifs en France, quoiqu’on ne dispose d’aucune estimation quantitative précise. L’espèce n’est pas classée « susceptible d’occasionner des dégâts » (nouvelle dénomination des « nuisibles ») mais reste chassable.
Un des modes de chasse, appelé « vénerie sous terre » ou déterrage, consiste à introduire des chiens spécialisés dans les terriers de blaireaux pour acculer ces animaux au fond du terrier, puis à creuser et à les attraper avec des pinces afin de les tuer à l’arme blanche ou au fusil, après plusieurs heures de stress intense et de souffrance. Les chiens lâchés dans le terrier peuvent tuer eux-mêmes les blaireaux et autres animaux, sans maîtrise possible par les chasseurs en surface. En plus du déterrage dans le cadre du statut chassable de l’espèce (« vénerie sous terre »), le déterrage peut aussi être autorisé par autorisations préfectorales pour des intérêts jugés prioritaires (dégâts, santé publique). Au total, le nombre de blaireaux tués par déterrage (« vénerie sous terre » et autorisations préfectorales) seraient d’environ 12 000 par an selon les chasseurs, sur une population dont l’effectif national s’élèverait probablement à quelques centaines de milliers mais n’est pas connu.
A partir du 15 mai, les chasseurs ressortent donc leurs pelles, pioches et autres instruments de torture pour s’adonner à leur cruelle passion : le déterrage de familles entières de blaireaux, directement au terrier. Interdite presque partout ailleurs en Europe, la chasse sous terre fait de la résistance en France, comme tant d’autres « chasses traditionnelles » désuètes et barbares qui échappent pourtant à toute justification scientifique.
Malgré quelques belles avancées locales, obtenues grâce à l’acharnement des associations devant les tribunaux (ex: la victoire de l’ASPAS en Gironde), la période complémentaire de vénerie sous terre est toujours une réalité dans une grande majorité de départements français. En effet, chaque année, au printemps, les préfectures publient ces projets d’arrêtés autorisant des périodes complémentaires de déterrage des blaireaux. Ces arrêtés et leurs périodes d’application peuvent varier d’un territoire à l’autre : certaines périodes complémentaires ne commencent par exemple qu’à partir du 1er juillet de l’année en cours, d’autres le 15 mai de l’année suivante ! Nous vous invitons donc à bien surveiller les sites de votre préfecture et regarder le détail de chaque projet d’arrêté.
https://twitter.com/ASPASnature/status/1379719813543645187
Pourquoi l’ASPAS réclame l’interdiction du déterrage des blaireaux ?
- il s’agit d’une pratique particulièrement cruelle ;
- le déterrage n’est pas sélectif et impacte des espèces protégées ;
- il ne résout aucun des problèmes sanitaires et autres dégâts aux activités humaines réels ou supposés qu’il prétend résoudre ;
- le nombre de blaireaux déterrés, l’effectif des populations et leur état de conservation ne sont pas réellement connus ;
- le déterrage des blaireaux est interdit dans la plupart des pays d’Europe ;
- les Français sont très majoritairement favorables à son interdiction.
Quels arguments pour sa défense ?
Une espèce fragile dont on ne connaît pas les populations exactes.
Aucune donnée scientifique sérieuse relative à la population de blaireaux n’est fournie, et les recensements de terriers, lorsqu’ils ont lieu, ne distinguent pas terriers principaux et secondaires, ce qui augmente artificiellement les effectifs estimés. Or, les destructions vont avoir lieu pendant plusieurs mois, et alors que la période de dépendance des jeunes blaireautins n’est pas terminée (de mars à août), ce qui est éthiquement insoutenable et catastrophique pour une espèce à faible taux de reproduction (une femelle a en moyenne seulement 2,7 jeunes/an).
Un véritable acharnement !
Le blaireau est un animal particulièrement impacté par les collisions routières. Espèce chassable jusqu’à fin février, le blaireau peut également subir des battues administratives. Autoriser une période complémentaire de déterrage à partir du 15 mai ne fait qu’accentuer l’acharnement contre cette espèce discrète et nocturne.
Des dégâts faibles et évitables
Les informations concernant les dégâts causés par les blaireaux ne sont pas précises. Les dégâts agricoles imputés à cette espèce sont très localisés (essentiellement en lisière de forêt), et sont souvent confondus avec les dégâts, autrement plus importants, provoqués par les sangliers. Ils peuvent être évités par des mesures de protection des cultures ou d’effarouchement, comme l’installation d’un fil électrique ou l’utilisation d’un produit répulsif.
Le déterrage peut favoriser la dispersion de la tuberculose bovine
La vénerie sous terre n’est d’aucune utilité pour lutter contre la tuberculose bovine ; au contraire, elle ne ferait que contribuer à son expansion ! C’est la raison pour laquelle, dans les zones à risque, un arrêté ministériel du 7 décembre 2016 interdit « la pratique de la vénerie sous terre pour toutes les espèces dont la chasse est autorisée en raison du risque de contamination pour les équipages de chiens ». La tuberculose bovine est une maladie d’origine agricole, transmise à beaucoup d’animaux sauvages dont les blaireaux qui peuvent ensuite devenir un réservoir. Depuis 2001, la France est considérée comme « officiellement indemne de tuberculose bovine » par l’Union européenne, malgré la persistance chaque année d’une centaine de foyers en élevage.
Une espèce protégée ailleurs en Europe
Le déterrage porte une atteinte supplémentaire à une espèce pourtant garante d’une biodiversité riche et d’une nature préservée. Elle est protégée chez nos voisins anglais, belges et néerlandais, et fait l’objet d’une attention particulière par la Convention de Berne, qui interdit le recours aux sources lumineuses. La France a d’ailleurs été récemment sommée de n’autoriser cet instrument que de manière très restrictive.
La réforme de 2019 ne change rien
La réforme ministérielle de février 2019, visant à limiter les souffrances des animaux, est inapplicable. Et surtout, rien ne change à la finalité même de la vénerie sous terre : celle de supprimer des animaux vivants, jugés indésirables par l’homme qui s’octroie un droit de vie et de mort sur des êtres sensibles (Plus de détails sur cette réforme).
Agissez ! Et signez la pétition : https://www.aspas-nature.org/blaireau
Et enfin découvrir la doc pour les enfants
Photo couverture : Fabrice Cahez
ASPAS
Association pour la protection des animaux sauvages