Numéro 13EthologieBien choisir son éducateur canin

Alice Mignot16 octobre 202316 min

Dans le monde de l’éducation canine, comme dans beaucoup de domaines, il y a plusieurs écoles et il est parfois difficile de faire le tri. Il est important de choisir le bon éducateur afin de garantir le bien-être de votre chien et des apprentissages sur le long terme. Heureusement, les recherches scientifiques sur le comportement canin et la façon dont les chiens apprennent se font de plus en plus nombreuses et nous permettent donc d’y voir plus clair (vous avez quelques références scientifiques à la fin de l’article sur ce sujet vous intéresse).

De quoi parle-t-on ?

Tout d’abord, avant de parler des conséquences des différentes méthodes, définissons les deux principaux modèles en éducation canine. D’un côté, nous avons l’éducation traditionnelle ou coercitive qui se base principalement sur la sanction des mauvais comportements (saccades, jets d’eau, canette remplie de boulons, pet corrector etc.). Les grades de violence utilisés dans cette méthode peuvent aller de crier sur le chien (et/ou sur son humain), lui mettre des saccades (coups secs sur le collier), à l’utilisation de colliers étrangleurs/électriques, à des coups sur le chien avec les pieds ou la laisse. Je vous invite à regarder l’enquête de One Voice sur ce type de clubs d’éducation (one-voice.fr/fr/blog/one-voice-au-tribunal-pour-combattre-la-violence-subie-par-des-chiens-dans-des-clubs-et-defendre-sa-liberte-dexpression.html). Dans cette méthode, on voit parfois le couplage à des friandises, ce qu’on appelle méthode mixte. Chez ce type d’éducateurs, vous entendrez des notions telles que la hiérarchie, la dominance, le chien ne doit pas monter sur le canapé, manger après vous etc.

De l’autre côté, nous avons l’éducation positive qui, elle, repose sur l’éthologie (discipline scientifique s’intéressant à l’étude du comportement animal). Dans la littérature anglaise, on peut aussi trouver des termes comme : éducation non aversive, non punitive, sans utilisation de la peur. Dans cette méthode, on va guider le chien vers le comportement attendu plutôt que d’attendre qu’il soit en échec pour le punir. Pour cela, on va utiliser le renforcement positif, c’est à dire qu’on encourage les bons comportements et on les récompense de façon à  ce que le chien les répète parce qu’il y trouve un avantage. On va également travailler en zone de confort, observer les signaux du chien et les respecter, anticiper l’environnement etc. Attention, ce n’est pas parce qu’un éducateur n’utilise pas de collier étrangleur ou ne tape pas votre chien qu’il travaille dans une méthode positive.

Quelle méthode « marche » le mieux ?

Tout apprentissage prend du temps et faire obéir un chien en claquant des doigts peut avoir l’air impressionnant mais ne représente pas forcément des apprentissages sur le long terme. Les méthodes positives sont associées à des plus hauts niveaux d’obéissance et moins de problèmes comportementaux et globalement être plus efficaces que les techniques aversives dans l’enseignement des comportements souhaités. Cela s’expliquer car, avec le renforcement positif, on va avoir une plus grande habileté à apprendre une nouvelle tâche alors que l’apprentissage par la peur et le stress perturbent l’apprentissage.

L’éducation coercitive marche mais à quel prix ?

Il est nécessaire de préciser ici que l’article R. 214-6 du Code Rural dispose que « l’exercice des activités d’éducation, de dressage ou de présentation au public dans des conditions et avec méthodes ou accessoires pouvant occasionner des blessures, des souffrances, du stress ou de la peur est interdit. Il doit être tenu compte de l’âge, de la volonté à agir, du sexe, et du niveau et des capacités d’apprentissage des animaux ». Aussi, les recherches montrent que la méthode coercitive a un impact sur le bien-être physique et psychologique des chiens et que celle-ci cause potentiellement de la peur ou du stress en comparaison à la méthode positive. Au-delà de signaux de peur, lors de l’utilisation de méthode coercitive, nous retrouvons d’autres signes de mal-être chez les chiens tels que l’augmentation de l’agression, de la peur généralisée, de l’apathie, des comportements d’évitement, de l’hypervigilance et de la peur de la nouveauté. A l’opposé, l’éducation basée sur le renforcement positif est donc liée à moins de signaux de stress comportementaux mais aussi à la présence d’émotions positives et une augmentation des comportements de jeu qui sont liés avec le bien-être.

Quelle méthode pour avoir une relation de confiance avec son chien ?

Ce qui ressort des recherches est que les chiens ayant reçu une éducation avec une méthode coercitive ou mixte vont avoir moins envie d’interagir avec les humains que cela soit par le regard ou dans la recherche du contact physique. On peut donc imaginer que la relation est de moins bonne qualité. Une seule punition va nécessiter beaucoup de renforcements pour réparer les dommages causés et redonner confiance au chien.

Pour conclure, cela doit vous alerter si votre éducateur :

  • utilise des outils qui peuvent être douloureux pour votre chien et/ou créer du stress (collier étrangleur, électrique, torcatus, licol)

  • prône de mettre des coups secs sur la laisse pour apprendre la marche au pied, détourner le chien, le « remettre à sa place »

  • vous parle de dominance, de hiérarchie, etc.

  • confronte votre chien à ses peurs ou ce qui le déclenche sans prendre en compte sa zone de confort

  • ne vous parle pas des signaux de stress chez le chien

  • épuise en soumettant le chien psychologiquement et/ou physiquement pour que celui-ci soit plus docile

  • utilise la peur/la contrainte pour que le chien écoute

  • ne vous valorise pas dans l’éducation de votre chien : il vous parle mal, vous fait culpabiliser, vous dit que vous êtes nul etc.

Pour en savoir plus :

Pour en savoir encore plus :

Deldalle, S., & Gaunet, F. (2014). Effects of 2 training methods on stress-related behaviors of the dog (Canis familiaris) and on the dog–owner relationship. Journal of Veterinary Behavior, 9(2), 58‑65. https://doi.org/10.1016/j.jveb.2013.11.004

Guilherme Fernandes, J., Olsson, I. A. S., & Vieira de Castro, A. C. (2017). Do aversive-based training methods actually compromise dog welfare? : A literature review. Applied Animal Behaviour Science, 196, 1‑12. https://doi.org/10.1016/j.applanim.2017.07.001

Todd, Z. (2018). Barriers to the adoption of humane dog training methods. Journal of Veterinary Behavior, 25, 28‑34. https://doi.org/10.1016/j.jveb.2018.03.004

Williams, E. J., & Blackwell, E. (2019). Managing the Risk of Aggressive Dog Behavior : Investigating the Influence of Owner Threat and Efficacy Perceptions. Risk Analysis, 39(11), 2528‑2542. https://doi.org/10.1111/risa.13336

Ziv, G. (2017). The effects of using aversive training methods in dogs—A review. Journal of Veterinary Behavior, 19, 50‑60. https://doi.org/10.1016/j.jveb.2017.02.004


Alice Mignot
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Phd in anthropology (Liege) & ethology (Nanterre)
« Dog’s Welfare in animal assisted interventions »

Il y a un commentaire

  • Cottet

    25 novembre 2023 à 20h31

    Les animaux n’ont pas à être éduquer pour devoir plaire aux gens qui l’ont acheter. Les animaux sont fait pour vivre librement pas devoir supporter les désirs des humains

    Répondre

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