L’Accompagnement Avec le Cheval fondé sur le bien être équin est aujourd’hui sur la sellette. Rempli de promesses, ce partenariat exceptionnel est une grande opportunité pour l’avenir des équidés et de l’humain si les responsables politiques concernés s’en saisissent dès maintenant, en soutenant sa professionnalisation et l’émergence d’une filière dédiée.
L’Accompagnement Avec le Cheval consiste en la capacité de mettre en place et développer une relation entre le bénéficiaire et l’équidé afin que le lien qui se tisse et vit entre les deux, ait un impact thérapeutique, ou éducatif ou social aussi bien au niveau mental, émotionnel que physique.
La cause équine est transversale : le bien être du cheval selon son point de vue (approche scientifique) est le socle de l’efficience de l’accompagnement et de la sécurité pour tous.
L’Accompagnement Avec le Cheval, est une activité aujourd’hui professionnalisée en France avec un cadre structurant et des exigences fortes en termes de pratiques vis-à-vis des personnes et du bien-être des équidés.
Les activités assistées avec le cheval forment un tout hétérogène, d’où la nécessité de revenir à la typologie internationale et nationale :
- A l’international on parle de EAA/T, Equine Assisted Activities / Therapy : Activités Assistées avec le Cheval sans ou avec Thérapies.
- En France ces activités sont regroupées sous l’appellation de Médiation Equine, et l’IFCE, institution représentative de la filière équine les distingue ainsi :
- Thérapie : équithérapie, thérapie avec le cheval, domaine de la santé
- Accompagnement avec le cheval, domaine du médico-social
Ces activités ne sont pas réglementées en France, au contraire de l’Italie où elles le sont par le Ministère de la Santé. Néanmoins en France, il y a eu une évolution significative au cours du temps qui, au fur et mesure des lacunes constatées, a conduit à une démarche de professionnalisation clairement identifiable.
En effet, dans les années 70, le rôle et l’impact positifs de l’équidé mis en relation avec les patients a été expérimenté et développé en associant les compétences existantes : le professionnel de santé et l’enseignant d’équitation. Cette approche de départ a montré ses insuffisances et ses limites : chacun manquant d’une compétence essentielle, celle de la connaissance du comportement tant humain qu’animal. Parallèlement les soignants professionnels ont développé la possibilité de prodiguer leur soin dit thérapie, soit psychique soit physique avec un cheval, par exemple le psychomotricien utilise les propriétés sensorielles et locomotrices du cheval, l’animal est ici un moyen.
A partir des années 2000, les actions Cheval/Handicap se sont spécifiées, une démarche de professionnalisation a été clairement entreprise par la FNHC (Fédération Nationale Handi Cheval), qui s’est ensuite développée et déclinée dans la filière avec l’apparition de l’Accompagnement Avec le Cheval dans la typologie de l’IFCE. On dépasse ici la dualité santé/équestre et thérapie/cheval pour inaugurer une logique métier autonome, fondée sur une approche scientifique de la communication, inter- et intra- espèce (éthologie scientifique appliquée), où le cheval a un rôle (cheval miroir et cheval partenaire) et la personne estconsidérée dans son entièreté grâce à la méthodologie de projet.
Cette activité dotée de compétences autonomes, dont la colonne vertébrale est le bien-être équin, est une chance pour l’avenir des équidés et un modèle pour la filière équine.
L’Accompagnement Avec le Cheval possède des compétences autonomes, relevant du médico-social exigeant un apprentissage et une expérience ancrés dans des compétences clés transdisciplinaires :
- Médico-sociale : méthodologie de projet de l’accompagnement, anatomie et pathologies
- Mises en œuvre des activités adaptées aux objectifs, gestion des risques liés aux pathologies
- Ethologie scientifique appliquée : activités, apprentissages équins et applications équestres
L’éthologie scientifique appliquée est le socle des compétences, car le cœur de l’activité c’est le cheval médiateur :l’équidé est l’interlocuteur du bénéficiaire et le partenaire du praticien.
- Cheval Miroir : il a la capacité extraordinaire de refléter l’émotion du cavalier par son expression : postures, comportement, et micro-signes, il apporte au praticien les éléments d’informations qui vont permettre à ce dernier de guider le bénéficiaire : compréhension et analyse, définition et ajustement du projet, des séances et des actions à mettre en place.
- Le praticien devra donc avoir une connaissance complète de son comportement et de son mode de communication, éthologie équine scientifique appliquée, il aura appris à le connaître et à le décoder sans jugement POUR LUI, comme il le fera avec le bénéficiaire. Ainsi aura-t-il à l’encontre du cheval et notamment lors de l’approche, un comportement de politesse, respect et considération.
- Le cheval forme, avec le praticien, un duo pro-actif et solidaire. L’équidé est considéré comme individu en tant que tel, il est un Partenaire, de la relation au même niveau avec la même importance que le bénéficiaire et le praticien, aussi ses réactions et son comportement sont observés avec la même attention. L’aide ne se fait donc pas par le cheval mais AVEC le cheval.
La condition de la pratique et de la sécurité de l’activité est le bien-être de l’équidé :
- Seul le cheval qui est dans une relation positive non contrainte avec en amont un apprentissage fondé sur des mémoires positives peut agir en connexion avec le praticien dans une relation de confiance où il est entendu et la communication peut s’instaurer et ensuite se développer avec le bénéficiaire. Les mémoires positives motivent l’animal à coopérer.
- La condition de la pratique et de la sécurité de l’activité est le bien-être de l’équidé de son point de vue et cela proscrit de fait : la gêne, la contrainte et la coercition, la privation de liberté, d’interactions sociales ou d’une nourriture adaptée (nourriture pauvre à volonté) générant des mémoires négatives, du stress et de la nervosité ou inversement un état apathique de résignation et d’évitement empêchant la disponibilité et la coopération, de plus un animal dans le mal-être est un animal dangereux.
L’Accompagnement Avec le Cheval incarne un renouveau, voire préfigure la restructuration de la filière équine :
- La filière en pleine restructuration, doit trouver un nouveau souffle et répondre aux exigences du public et des clients demandeurs d’une part du bien-être équin à tous les niveaux et d’autre part de la pratique d’activités visant à établir une relation avec l’équidé, d’apprendre à le connaître, de vivre des moments de partage loin de la domination, de la compétition….
- L’Accompagnement Avec le Cheval repose sur une professionnalisation et une approche scientifique du bien être des équidés permet une transposition et une déclinaison de son approche et de ses compétences à l’ensemble de la filière y compris les activités de sports et loisirs.
- C’est une grande opportunité pour les équidés, que le bien être équin d’un point de vue du cheval devienne la norme et la condition des activités en général avec les équidés : liberté et contacts sociaux, alimentation adaptée, prise en compte des indicateurs bien-être mal-être dans leur gestion et leur apprentissages, basés sur la génération de mémoires positives. Il s’agirait de s’attaquer directement aux maltraitances ordinaires, vie quotidienne de la plupart des équidés c’est-à-dire la négation des besoins et comportements liés à l’espèce : besoins vitaux, sociaux, physiologiques et affectifs.
Opportunités et menaces de la réglementation de l’activité
Le contexte non réglementé de ces activités et l’opportunisme économique amènent à la croisée des chemins : la légitimation de « l’occupationnel » ou l’exigence du professionnalisme
- Les activités dites de médiation équine, non réglementées en France, connaissent, en raison de la grande diversité de pratiques, un problème majeur de qualité et de sécurité. De ce fait l’essentiel des activités aujourd’hui proposées, relèvent de « l’occupationnel », non réalisées par des praticiens qualifiés avec des équidés bénéficiant de conditions de bien-être.
- Parallèlement elles connaissent aujourd’hui un essor ou du moins une perspective d’essor, avérée depuis plusieurs décennies dans des pays avancés, et à ce titre suscitent la convoitise de certains acteurs de la filière équine, qui y voient une possibilité de ‘rebondir’ économiquement et financièrement.
Ainsi la diversité des pratiques et les opportunismes économiques ont motivé une volonté de réglementation et des initiatives très orientées, qui en l’absence d’une intervention claire du Ministère de la Santé, a laissé libre court à d’autres acteurs, qui tentent de porter une volonté de réglementation non seulement ignorant l’évolution de ces activités et leur phase de professionnalisation mais menaçant même leur avenir en termes de formation et d’exercice.
- Opportunisme économique : exclure une approche fondée sur l’éthologie scientifique équine appliquée, c’est-à-dire sur le bien-être du cheval de son point de vue, permet de servir les intérêts et d’éviter la remise en cause d’un certain nombre de modèles économiques de la filière, qui voient le bien-être équin comme une menace à contrer, d’une part par une démarche pseudo commerciale et d’autre part par le développement d’un argumentaire anti-animaliste, au lieu de saisir ce mouvement de fond sociétal tel qu’il est, c’est-à-dire une opportunité de restructuration de la filière et d’apporter du bien-être aux équidés.
- Tentative de déplacer l’ensemble des activités de médiation équine de la santé & médico-social vers le sport & loisirs, avide d’une nouvelle manne financière. Cela signifierait :
- Archaïsme : retour à une ancienne distinction des années 70 : professionnel de santé/équestre qui n’est plus pertinente ni en théorie ni en pratique.
- Déprofessionnalisation : remise en cause de l’exigence et de l’existence d’une identité professionnelle propre à la médiation équine, avec une mise en cause de la professionnalisation entreprise.
- Danger pour les bénéficiaires ET pour les équidés. En effet les enseignants d’équitation ne sont formés :
- Ni sur le volet santé & médico-social : accompagnement, pathologies ciblées
- Ni sur le volet équin : comportement des équidés, communication inter- et intra-espèces, apprentissages équins fondés sur l’éthologie scientifique appliquée.
- Ni sur la médiation, opportunités, impacts et risques de l’interaction avec l’équidé
Ici il ne s’agit pas d’apprendre à monter à cheval, mais d’interagir avec le cheval, qui est le médiateur entre le bénéficiaire et le praticien. Le praticien ne fait en aucun cas et à aucun moment appel aux compétences et à l’enseignement de l’équitation classique de sport & loisirs, il n’enseigne pas et ne fait pas pratiquer l’équitation.
A la vue des éclairages précédents en termes de compétences et d’identité professionnelle (médico-social), il est évident que le Ministère de la Santé et des Solidarités et en particulier le Secrétariat d’Etat en charge des personnes handicapées, a un rôle primordial à jouer en termes de reconnaissance et de régulation. En effet les métiers, activités centrées sur le public handicapé et en situation de fragilité met en jeu une responsabilité significative vis- à- vis de ce public, car il requiert des compétences avérées en accompagnement et/ou en soins de telle sorte que cette responsabilité ne peut être laissée sans préjudice à des professionnels sous la tutelle d’un autre ministère.
Rachel Cado
Fondatrice et Présidente de Mécénat Léonie
Membre de HETI (Federation of Horses in Education & Therapy International)