Numéro 14Animaux domestiquesDe l’Education Nationale aux métiers de la relation à l’animal : ambitions et réalité

Nathalie Roblin15 janvier 202425 min

Pendant quinze ans, j’ai exercé en tant que professeure des écoles, dans des Réseaux d’Education Prioritaire, en Seine-Saint-Denis et dans les Hauts-de-Seine. J’ai eu des classes de niveaux très hétérogènes, avec des élèves performants et des élèves à besoins spécifiques, en difficultés scolaires, porteurs de troubles ou de handicap.

Faire avancer chacun à son rythme, tout en réduisant les inégalités était une équation toujours plus complexe à résoudre. J’étais partagée entre volonté et frustration et me sentais souvent démunie devant certains profils atypiques. Ces derniers ne se conformaient pas toujours aux attentes du système scolaire et semblaient parfois égarés, au milieu du bruit et de l’agitation d’une classe maternelle de 25 enfants. Néanmoins, je constatais que certains manifestaient un véritable attrait pour le vivant : oiseaux, escargots ou autres insectes qui peuplaient la cour de récréation et les terrariums de la classe.

Par ailleurs, mon expérience personnelle des animaux m’a permis de constater l’influence positive de leur présence sur mon moral. Ces convictions m’ont amenée à me questionner sur la médiation animale, définie par la Fondation Adrienne et Pierre Sommer comme une « méthode d’intervention basée sur les liens bienfaisants entre les animaux et les humains, à des fins préventives, éducatives ou thérapeutiques ». J’ai alors souhaité me former à cette démarche d’aide alternative pour accompagner des personnes avec l’assistance d’animaux.

Après une année d’étude, j’ai obtenu une licence professionnelle « Métiers de la relation à l’animal : médiation, éducation, comportement », délivrée par l‘Université Paris Nanterre et Animal University. C’est une formation qui prépare les professionnels à intervenir en médiation animale et en comportement canin et félin. Ces métiers sont enseignés sous le prisme de l’éthologie, la psychologie, la philosophie, l’anthropologie, les méthodes d’éducation et de résolution des problématiques rencontrées chez le chien ou le chat.

Dans cette licence, plusieurs modules sont consacrés à l’éthique animale, j’ai ainsi pu soumettre mes ambitions à l’épreuve de la théorie et acquérir une compréhension plus réaliste des métiers d’intervenante en médiation animale et de comportementaliste. En effet, des études ont montré que, dans certaines conditions, les séances de médiation animale peuvent générer du stress, affecter le bien-être, et à long terme, la santé des animaux. L’avantage de cette formation est précisément de nous former aussi au comportement animal et ainsi d’être plus à même de repérer les signaux d’inconfort. La médiation animale doit donc apporter du mieux-être aux bénéficiaires et aux animaux, en enrichissant le quotidien de chacun par des interactions positives et stimulantes.

Au cours de cette année, j’ai eu la chance de réaliser un stage de médiation animale auprès de Linda Balaabi, chargée de projets en médiations par la nature au sein de l’Association Elma, à Neuilly sur Marne. Elle a développé une approche holistique de médiation à travers l’animal, le végétal et la biodiversité. Elle intervient avec ses cochons d’Inde, ses chats et son chien, notamment en crèches, Ehpad, classe Ulis, Institut Médico-Educatif, et centre social. Linda a tissé un lien d’attachement solide avec ses animaux, ce sont des partenaires de vie avant d’être des animaux médiateurs. En séance, elle veille à instaurer un climat de bientraitance, s’assure que les bénéficiaires interagissent de manière appropriée avec les animaux, et que ces derniers puissent s’isoler s’ils le souhaitent dans un coin de repos matérialisé par un couffin ou un sac de transport. Ses animaux conservent ainsi un sentiment de contrôle, essentiel pour la perception qu’ils se font des séances. Ils profitent de séances stimulantes d’un point de vue cognitif et social.

Du côté des bénéficiaires, j’ai constaté que la présence des animaux encourage l’engagement, l’attention, l’altruisme, le plaisir, la motivation et la communication. En crèche, les enfants retirent des bénéfices en termes d’actions motrices, langage et éveil sensoriel. En Ehpad, si certains résidents se montrent parfois réticents en début d’activité, on constate souvent un meilleur état émotionnel à la fin. L’animal les aide à dépasser le simple bonjour, habituellement échangé, pour partager des mimiques, des regards, des sourires et des souvenirs. Quant aux enfants porteurs de Troubles du Spectre Autistique, ils expriment un intérêt particulier pour les animaux qui leur permettent de développer leur assurance et leurs aptitudes cognitives, sociales et affectives. Le chien, notamment, donne à voir une dimension plus sociale de leur personnalité, que ne laisse présager la neutralité de leurs expressions. L’animal garde une attitude stable, non jugeante et rassurante, quels que soient l’âge, le handicap ou la personnalité du participant. Il offre une valeur ajoutée à la relation d’aide, en la rendant plus chaleureuse, et paradoxalement, plus humaine.

Ces observations ont donc répondu à mes questions, la médiation animale offre une prise en charge complémentaire pertinente pour les personnes à besoins spécifiques. Mais une relation de qualité ne peut se construire que si le bien-être animal est respecté. Je développerai cette activité dans les années à venir car j’ai pour l’instant un chat de 15 ans qui, du fait de son âge et son tempérament craintif, n’est pas du tout apte à la médiation. Il est important de souligner que tous les animaux de compagnie ne font pas forcément de bons animaux médiateurs. Au-delà de l’espèce et de la race, il faut considérer l’individu, son âge, son état de santé, son tempérament, sa motivation, sa socialisation et son entrainement.

Mon chat est, en revanche, un excellent professeur d’éthologie féline, il m’a appris à être patiente, à respecter son périmètre de tranquillité, sa temporalité et sa sensibilité. Il a été un formidable tuteur de stage et m’a aidée à mieux me saisir des cours théoriques sur le comportement du chat. Ainsi, mon activité est aujourd’hui centrée sur les conseils en comportement félin, le petsitting, les promenades canines et le transport d’animaux pour les rendez-vous vétérinaire ou toiletteur. Le métier de comportementaliste félin repose sur la psychologie et l’éthologie. Avec ce service, j’aide les humains à mieux comprendre les besoins de leur chat, à améliorer leur bien-être, à renforcer leur relation et à résoudre des problématiques comportementales. En effet, choisir de vivre avec une autre espèce suppose de faire des compromis entre les besoins naturels de l’animal et nos attentes en tant qu’humains, il s’agit donc de réaliser des ajustements des deux côtés pour une meilleure cohabitation inter espèces.

Selon un sondage Ipsos paru en juin 2023, 1 français sur 2 vit avec un animal de compagnie et 68% d’entre eux le considèrent comme un membre de leur famille. Dans une société où l’animal occupe une place toujours plus importante, notre rôle, en tant que professionnels des métiers de l’animal, est de favoriser des interactions entre l’humain et l’animal qui soient équilibrées et bénéfiques à chacun. L’entreprise Croc Cœur trouve sa source dans l’accompagnement bienveillant et propose des services pour harmoniser la relation humain – animal, en répondant à leurs besoins respectifs.


Nathalie Roblin
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2 commentaires

  • Barreau Alexandra

    21 mars 2024 à 16h24

    Bonjour,

    Je cherche actuellement à effectuer une reconversion professionnelle en comportementaliste (plutôt félin) et/ou médiation animale. Je viens de découvrir la licence pro relation animal-compagnon de Nanterre. La recommandez vous ?

    Bien cordialement,

    Répondre

  • FAU Edwige

    15 janvier 2024 à 14h25

    On ressent à travers cet article votre passion, votre affection et respect envers les animaux, mais aussi votre compréhension des différents besoins ainsi que votre engagement envers le bien-être des animaux.
    MERCI à vous !

    Répondre

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