ActualitésAnimaux domestiquesBien-être animal et humain en refuge animalier

Réale Couchaux21 mars 202426 min

Le bien-être animal est au cœur des préoccupations des Français comme le montre le dernier sondage de l’IFOP et de la Fondation 30 Millions d’Amis en date de février 2024.

Si cette notion de bien-être animal semble devenir une évidence tant la population s’y montre sensible, elle reste néanmoins disparate en fonction de la catégorie à laquelle appartiennent les animaux (animaux domestiques, de ferme ou sauvages) et du lieu de vie de ces individus (en foyer, en refuge, en élevage ou dans un habitat naturel).

Notre parcours au sein de la Protection Animale, d’abord en tant que bénévole, puis en tant que professionnelle, et les formations suivies dans ce domaine, nous ont conduit à nous interroger sur le bien-être animal en refuge.

Mais sensible à une vision holistique du bien-être, et ancrée dans un parcours professionnel centré sur la relation d’aide à l’homme et à l’animal, nous avons été tout aussi attentive au bien-être humain tout au long de ce parcours dans la protection animale. Et nous posons aujourd’hui un regard novateur sur la nécessaire symbiose entre bien-être animal & humain afin de garantir la pérennité de la relation d’aide au sein des structures accueillant des animaux.

Le bien-être animal est défini comme « l’état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal » (Avis Anses, février 2018). 

Le refuge est un espace où la notion de bien-être animal mérite une plus grande attention : bruits, enfermement, passages réguliers d’inconnus, proxémie, manque d’interactions…sont autant de paramètres à prendre en compte dans l’amélioration du quotidien des pensionnaires. L’amélioration de ce quotidien afin de réduire le stress de l’enfermement, et ce dans l’optique d’une adoption dans un laps de temps réduit, est un véritable défi pour les acteurs de la PA submergés par leur charge de travail quotidienne.

Si des outils comme les 5 libertés fondamentales définies par l’OIF[1] permettent de mesurer le bien-être animal en refuge, nous devons garder à l’esprit que chacun des pensionnaires aura son propre curseur pour exprimer son bien-être. La définition du bien-être animal citée induit l’aspect physique et émotionnel dans l’évaluation de ce dernier. Aussi, les émotions ressenties par l’animal sont donc être primordiales pour évaluer son bien-être.

Et sur ce point, notre expérience en refuge a permis de mesurer l’impact positif de mesures mises en place dans cette optique. Si nous avions déjà consacré un article à ce sujet[2], nous avons pu depuis renforcer nos observations en ce sens. Et si ces activités ne permettent pas de créer un environnement parfaitement serein, elles servent malgré tout de palliatifs à l’altération de l’état physique et mental des protégés. De surcroît, ces activités permettent de fédérer l’équipe salariés et bénévoles autour du bien-être animal, et de faire converger Protection Animale et Education Canine / Sport Canin dans une optique de réhabilitation, véritable clé de leur adoption.

La question du bien-être animal en refuge mérite donc une analyse systémique tenant compte de critères essentiels : nourriture, abreuvage, infrastructures adaptées, confort, soins… Mais aussi de critères empiriques incluant les besoins spécifiques propres à chaque espèce et individus accueillis sur site.

Si le bien-être est largement pris en compte dans le cadre des risques psycho-sociaux du personnel soignant, cette thématique est quasi absente des réflexions menées sur les métiers de relations d’aide en refuge. Et pourtant, toute personne investie dans une mission de protection animale, que ce soit en tant que bénévole ou salarié, est ancrée dans une relation d’aide à autrui, et de ce fait est soumise aux mêmes risques psycho-sociaux que le personnel soignant.

Le contact prolongé avec la détresse et la souffrance des animaux, le manque de moyen financier, humain et matériel induisent un risque élevé de conduire à un épuisement des personnes investies en refuge, tant sur le plan physique qu’émotionnel. L’altruisme et l’abnégation remarquables dont font preuve chaque jour ces personnes sur le terrain ne doivent pas pour autant occulter la prise en compte des « coûts » psychiques liés aux soins prodigués à autrui.

Fatigue compassionnelle, déshumanisation de la relation interpersonnelle, misanthropie, dépressions, burn-out, sont des réalités du quotidien des soignants animaliers. Et si le taux élevé de suicide chez les vétérinaires est souvent évoqué[3], le mal-être des personnes engagées auprès des plus vulnérables reste quant à lui tapis dans l’ombre, d’autant plus que l’engagement dans cette mission induit souvent chez la personne engagée une abnégation de soi « Je n’ai pas le droit d’aller mal face à l’immense détresse de tous ces animaux maltraités, abandonnés, torturés… » Accomplir sa mission au détriment de son bien-être, tel est souvent le piège des métiers passions, véritable vocation.  

Face aux problématiques récurrentes dans la Protection Animale :

  • Saturation des refuges avec croissance constante des prises en charge
  • Augmentation des incivilités
  • Gestion quotidienne de la détresse animale
  • Charge émotionnelle du personnel non exprimée

et face à leur répercussion sur le bien-être de ses acteurs et de ses protégés, nous envisageons un accompagnement dans la mise en place de solutions individuelles et organisationnelles afin d’apaiser et de pérenniser la relation d’aide en refuge.

Et si le bien-être est une composante essentielle de la vie du refuge, c’est aussi un critère primordial d’adoption, les adoptants étant eux aussi fondamentalement attentifs au bien-être des pensionnaires. Quant au bien-être du personnel, celui-ci rejaillit inéluctablement sur l’accompagnement du projet d’adoption des personnes qui franchissent la porte d’un refuge, et se prolonge dans le relationnel post-adoption.

Aussi, dans la prise en compte holistique du bien-être dans les structures d’accueils pour animaux, tout le monde est gagnant !

Pour affiner ce projet, nous avons besoin de votre aide. Si vous travaillez en refuge, que vous y êtes bénévole ou que vous avez adopté en refuge ou projetez de le faire, nous vous invitons à remplir ce questionnaire. Cela vous prendra environ 5 minutes.

docs.google.com/forms

Nous pourrons ainsi mieux appréhender les représentations du bien-être animal & humain en refuges, et de mieux les intégrer à notre projet.

En vous remerciant pour l’intérêt porté à cette problématique fondamentale dans la protection animale


  • [1] Absence de faim, de soif, de malnutrition
  • Absence de peur et de détresse
  • Absence de stress physique et /ou thermique
  • Absence de douleur, de lésions, de maladie
  • Liberté d’expression d’un comportement normal de son espèce

[2] Bien-être animal et amélioration du quotidien de nos pensionnaires au refuge de la SPA de Laon : notre priorité pour 2023 ⋆ Savoir Animal (savoir-animal.fr)

[3] D’après une étude réalisée en 2022 pour le compte de l’association Véto-Entraide et du CNOV, auprès de 3244 vétérinaires français, le taux de suicide dans la profession est trois à quatre fois plus élevé que parmi les professionnels de santé humaine.


Réale Couchaux
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2 commentaires

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  • Robache jpierre

    24 mars 2024 à 21h01

    Article intéressant et important, j’ai actuellement un chien de 3ans adopté chiot en spa ,j’ai toujours eu un chien. Ils est évident que j’ai une grande affection et respect pour le bien-être animal.le problème ce sont beaucoup trop de gens, qui malheureusement les abandonnes, et les maltraites. Il faut mettre en place un suivi et surtout ne plus en confié au irresponsable qui les font souffrir. C’est bien compliqué, c’est déjà un pas de prendre la cause animale en considération, ont peut faire mieux.

    Répondre

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