Ce mercredi 30 juillet, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a rendu sa copie sur le « bien-être » des animaux élevés pour la fourrure. Un avis scientifique demandé par la Commission européenne pour finaliser sa réponse à l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) « Fur Free Europe ».
Des conditions d’élevage inadaptées
Pour son étude, l’EFSA s’est concentrée sur les espèces sauvages élevées en Europe pour la fourrure : visons d’Amérique, renards roux, renards polaires, chiens viverrins et chinchillas. Les conclusions de l’avis scientifique de l’EFSA sont sans appel, les conditions actuelles d’élevage ne répondent pas aux besoins spécifiques des espèces concernées « chez toutes les espèces, la restriction des mouvements, l’incapacité à adopter un comportement d’exploration ou de recherche de nourriture, la sous et surstimulation sensorielle ont été identifiées comme conséquences sur le bien-être animal ». Le rapport détaille la situation espèce par espèce et relève d’autres sources de souffrance « des dommages aux tissus mous et téguments (visons), le stress lié à la manipulation (visons et renards), des troubles locomoteurs (renards polaires et chiens viverrins), des problèmes de repos et stress de prédation (chinchilla)… ». Pour l’EFSA « ni la prévention ni l’atténuation substantielle des conséquences identifiées sur le bien-être ne sont possibles dans les systèmes actuels. »
Aménager les cages ou abandonner l’élevage ?
Il ne revient pas à l’EFSA de prendre une décision politique quant au devenir des élevages d’animaux pour la fourrure, la Commission européenne doit toutefois s’appuyer sur cet avis scientifique et sur une évaluation des incidences économiques et sociales avant de présenter, courant 2026, sa proposition de Règlement.
Dans son rapport, l’EFSA donne des pistes d’amélioration qui nécessiteraient de sortir des systèmes actuels d’élevage pour des alternatives (enclos collectifs, point d’eau pour les espèces semi-aquatiques…) qui n’existent pas dans cette filière. Si la Commission devait ne proposer que des normes plus respectueuses du « bien-être » animal, cela nécessiterait des recherches et un accompagnement financier, sur fonds européens, pour une production en perte de vitesse. Peu probable donc, mais il faut rester vigilant car nous ne sommes jamais à l’abri d’une mauvaise surprise.
Les élevages de visons interdits dès 2027 en Europe ?
Le 17 juillet 2025, la Commission européenne a inscrit (Règlement d’exécution UE 2016/1141) le vison d’Amérique parmi les espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l’Union. Cette espèce est utilisée en élevage, pour la fourrure, et cette inscription rend théoriquement impossible, à compter du 7 août 2027, son exploitation… théoriquement car le texte laisse une possibilité de recours pour les Etats membres qui, comme le Danemark, souhaite poursuivre leur activité.
Une demande citoyenne forte
Si la Commission européenne a missionné l’EFSA pour un avis scientifique sur les conditions d’élevage des animaux à fourrure, c’est pour répondre à la mobilisation citoyenne autour de l’ICE « Fur Free Europe » qui a recueilli plus d’1,5 million de signatures certifiées (dont 107 000 en France). Cette réponse pourrait être intégrée à la proposition de révision de la réglementation « bien-être » animal en élevage, attendue fin 2026, qui devait initialement proposer une sortie des cages pour toutes les filières d’élevage (il se dit que cette interdiction pourrait être finalement limité à certaines espèces). Cette révision importante répond à une autre ICE « End the Cage Age », preuve en est que la mobilisation citoyenne est utile aux animaux.
Une volonté européenne d’interdire les élevages
Le 30 novembre 2021, la France adopte la loi n° 2021-1539 visant à lutter contre la maltraitance animale qui fixe notamment l’interdiction, sans délai, des « élevages de visons d’Amérique et d’animaux d’autres espèces non domestiques exclusivement élevés pour la production de fourrure ». De nombreux autres Etats membres de l’UE ont pris les mêmes dispositions, notamment l’Autriche, les Pays-Bas, la Slovénie, la Croatie, la République Tchèque, la Belgique, l’Italie… Si l’Europe reste l’un des principaux producteurs de peaux de visons et renards, le déclin est massif et continu. Selon la coalition fur free alliance, dans l’UE la production de peaux de visons est passée de 40 millions en 2016 à 18 millions en 2020, et à 7,5 millions en 2022.
Interdiction du commerce
L’autre objectif de l’ICE « Fur Free Europe », outre la fin de l’élevage, est d’interdire la commercialisation de toute fourrure d’élevage en Europe. Face aux potentiels et prévisibles recours auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), l’Union européenne dispose de deux précédents : son règlement n° 1523/2007 du 11 décembre 2007 « interdisant la mise sur le marché, l’importation dans la Communauté ou l’exportation depuis cette dernière de fourrure de chat et de chien et de produits en contenant », et son règlement n° 1007/2009 du 16 septembre 2009 « sur le commerce des produits dérivés du phoque ». Ce dernier règlement européen a fait l’objet d’une procédure du Canada et de la Norvège auprès de l’OMC, peine perdue pour ces deux pays.
Dès lors que toute production est interdite au sein de l’Union européenne et que cette décision a été prise pour répondre à la mobilisation des citoyens européens, l’UE dispose du levier de la « protection de la morale publique » déjà utilisé, avec succès, pour l’adoption des deux règlements précités.
Prochaines étapes
Le 11 septembre prochain, l’Intergroupe du Parlement européen « sur le bien-être et la conservation des animaux » sera consacré à ce sujet. Je serai à Strasbourg pour représenter la Fondation 30 Millions d’Amis et participer à cette réunion car s’il y a une réelle opportunité d’obtenir une victoire qui épargnera des millions d’animaux, il est nécessaire pour cela de sensibiliser et mobiliser les eurodéputés afin que le Parlement soit la voix des citoyens européens, mais aussi celle des sans voix encagés, gazés ou électrocutés pour être dépouillés de leur fourrure.

Christophe Marie
Directeur Affaires nationales et européennes à la Fondation 30 Millions d'Amis, auteur "Animaliste" ; "Lutter contre la souffrance animale - Pour une Europe des animaux"
Il y a un commentaire
TESSON
1 août 2025 à 18h53
Bonjour,
Pourriez-vous avoir la gentillesse de relayer cet événement contre la corrida, qui aura lieu le 15 août à Béziers ?
APPEL A MOBILISATION : CONTRE LA CORRIDA, REJOIGNEZ NOUS LE 15 AOUT A BEZIERS 😉
https://fb.me/e/6KVdIkJ6n
Un immense merci d’avance !
Véronique Tesson