ConsommationActualitésDes animaux découpés vivants à l’abattoir de Craon (Mayenne)

L214 Ethique & Animaux18 janvier 2024212 min

L214 révèle une nouvelle enquête sur les conditions de mise à mort des animaux (filières conventionnelle, biologique, AOC) à l’abattoir municipal de Craon (Mayenne – Pays de la Loire). Les images montrent des scènes dignes d’un film d’horreur. L214 porte plainte pour cruauté et demande la fermeture immédiate de l’abattoir.

La majorité des animaux restent conscients ou reprennent conscience après l’étourdissement : à l’affalage (sortie du box d’immobilisation) ou au poste de saignée, des veaux, vaches, bœufs relèvent la tête et se débattent avant et après l’égorgement. Les relevés de tête ou de tronc, les animaux qui tentent de se relever sur leurs pattes, ou qui rampent au sol sont des signes de reprises de conscience.
Des vaches commencent à être découpées alors qu’elles sont encore vivantes : elles réagissent aux coups de couteau et à la pince guillotine lors de la découpe de leurs pattes, de leurs cornes ou de leur tête. Les étourdissements ratés, les délais longs entre l’étourdissement et l’égorgement, la découpe qui intervient trop rapidement après la saignée, et l’absence d’intervention des services vétérinaires expliquent en partie cette situation effroyable.

Il arrive qu’une corne ou une patte se coince dans la grille d’affalage : dans cet extrait, on voit les opérateurs tenter de dégager la corne coincée d’une vache. Finalement, elle est égorgée en dehors de la zone de saignée et sa corne est sciée sans attendre sa mort (la découpe ne doit commencer que lorsque l’animal est mort).

Cet abattoir présente d’importants problèmes structurels, principalement au poste d’étourdissement.
En effet, le box d’immobilisation ne permet pas d’immobiliser suffisamment les animaux car il n’est adapté ni à leur taille ni à leur espèce. Par conséquent, le pistolet à tige perforante, qui est censé endommager le cerveau des animaux pour les rendre inconscients, ne peut être orienté et positionné correctement. Afin de pallier ce problème structurel, les opérateurs tentent d’immobiliser certains bovins en leur projetant un jet d’eau dans les yeux.

Il n’y a jamais d’évaluation de l’état d’inconscience des animaux. Par conséquent, les opérateurs n’ont pas recours aux étourdissements d’urgence, pourtant nécessaires. Malgré ces infractions, aucune modification des modes opératoires n’est apportée par la direction de l’abattoir ni par les services vétérinaires pourtant présents sur place.

Les éleveurs déchargent eux-mêmes leurs animaux. Des bovins sont frappés afin d’être orientés vers des cases individuelles à peine plus grandes qu’eux. L’aiguillon électrique est utilisé de façon abusive et hors cadre réglementaire1. Ils attendront de longues heures avant d’être amenés sur la chaîne d’abattage.

L214 porte plainte contre l’abattoir auprès de la procureure du tribunal judiciaire de Laval pour actes de cruauté, sévices graves (article 521-1 du Code pénal) et mauvais traitements (article L 215-11 du Code rural) pour les faits suivants :

  • les coups d’aiguillon sur des endroits interdits (les bovins font l’objet de chocs électriques sur la tête, le museau, le dos, l’anus, endroits qui sont formellement interdits) ;

  • les coups donnés aux animaux (dans la bouverie) ;

  • la saignée d’animaux conscients (quasiment tous les bovins présentent des signes de conscience, parfois très clairs et manifestes, et sont malgré tout saignés sans étourdissement de secours) ;

  • la découpe d’animaux vivants (des animaux présentent lors de leur découpe des signes de vie) ;

  • l’inadaptation des installations et du matériel (box d’immobilisation, table d’affalage, élingues et treuil) ;

  • l’absence d’immobilisation (le box ne permet pas d’immobiliser les bovins) ;

  • les temps d’attente excessifs dans le box d’immobilisation ;

  • le défaut de vérification de l’état d’inconscience et l’absence d’étourdissement de secours.

L’association a remis à la justice 4 h 10 min d’images de preuves des infractions.

L214 porte également plainte sur le délit de mise en danger de la vie d’autrui prévu et sanctionné par l’article 223-1 du Code pénal pour les infractions commises par l’employeur envers ses salariés (Code du travail). En effet, les opérateurs courent des risques majeurs de sécurité au moment de l’étourdissement des veaux, de l’accrochage des bovins, et de la saignée des animaux.

La plainte porte également sur le délit de tromperie du consommateur (Code de la consommation, voir paragraphe plus bas sur l’AOC).

Par ailleurs, l’association demande la fermeture administrative immédiate de l’abattoir, qui ne respecte pas les règles minimales en matière de protection des animaux et pose de sérieux problèmes de sécurité des opérateurs.

Pour le professeur Mouthon, docteur vétérinaire, professeur agrégé : « Il se pose la question de la responsabilité des préposés sanitaires de cet abattoir chargés de la surveillance des conditions de manipulation des animaux qui ne peuvent ignorer ces pratiques et, s’ils ne peuvent les interdire, ne les ont pas dénoncées. Ils se rendent alors complices de ces infractions.
Plus grave est la faute professionnelle du vétérinaire sanitaire responsable dans cet abattoir qui n’est pas intervenu pour faire arrêter ces actes de mauvais traitements en bouverie et ces actes de cruauté sur la chaîne d’abattage : au-delà de la faute professionnelle, c’est un délit de complicité d’actes de cruauté.
 »

Pour Sébastien Arsac, cofondateur de L214  : « On est au summum de l’horreur ! Ce que vivent ces animaux est insoutenable. Combien d’enquêtes devrons-nous révéler avant que le ministère de l’Agriculture se décide à réagir sur les graves défaillances de ses organes de contrôle ? Les services vétérinaires de l’État présents dans l’abattoir sont incapables de relever et de corriger des non-conformités pourtant flagrantes. À quoi servent-ils ?
Nous portons plainte et comptons sur la préfète de la Mayenne pour prononcer la fermeture de cet abattoir qui ne respecte pas la réglementation, ne fait rien pour limiter les souffrances des animaux et met en danger ses employés. Une action rapide, appropriée et responsable est indispensable.
 »

La commune de Craon est propriétaire de l’abattoir.
Il abat chaque année environ 4 500 animaux. Son budget 2023 s’élève à 2 600 139 €. C’est un établissement public multi-espèces : bovins, ovins, caprins, porcins, équidés et cervidés. Les animaux qui y sont abattus proviennent d’élevages conventionnels ou biologiques. La viande de certains bovins est vendue sous AOC Maine-Anjou.

Dans le cadre du Plan abattoirs, dont l’un des objectifs est de moderniser les abattoirs, l’établissement a été sélectionné par la région Pays de la Loire pour percevoir une subvention publique d’un montant de 266 310 €, dont une partie devait servir en 2021 à la rénovation du box d’immobilisationLes défaillances du poste d’étourdissement sont donc connues, depuis au moins 2021, par l’abattoir et les services vétérinaires de l’État. Trois ans plus tard, ce box n’est toujours pas en conformité avec la réglementation.
Il est à noter qu’en 2020, la commune de Craon avait prévu un budget de plus de 20 000 € pour former le personnel aux « bonnes pratiques d’abattage ».

La mise à mort des animaux en abattoir est encadrée par le règlement européen 1099 du 24 septembre 2009, par les articles R214 (section abattage) du Code rural et par l’arrêté du 12 décembre 1997. Voici quelques extraits de ces textes en lien avec les infractions commises à l’abattoir de Craon.

Sur le délai entre l’étourdissement et la saignée (Code rural)
« La saignée doit commencer le plus tôt possible après l’étourdissement et en tout état de cause avant que l’animal ne reprenne conscience. »

Sur l’étourdissement (arrêté du 12 décembre)
« Les matériels utilisés pour l’étourdissement des animaux doivent être en toutes circonstances immédiatement efficaces dans leur emploi de façon à plonger l’animal dans un état d’inconscience où il est maintenu jusqu’à l’intervention de la mort afin de lui éviter toute souffrance. »

Sur le contrôle de l’inconscience (règlement européen 1099)
« Les exploitants veillent à ce que les personnes chargées de l’étourdissement […] procèdent à des contrôles réguliers pour s’assurer que les animaux ne présentent aucun signe de conscience ou de sensibilité pendant la période comprise entre la fin de l’étourdissement et la mort. »

Sur l’état d’inconscience (règlement européen 1099)
« L’animal est maintenu dans un état d’inconscience et d’insensibilité jusqu’à sa mort. »

Sur la découpe (règlement européen 1099)
« L’habillage ou l’échaudage ne sont pratiqués qu’après vérification de l’absence de signe de vie de l’animal. »

Un rapport publié le mois dernier par le ministère de l’Agriculture reconnaît les carences de ses services vétérinaires : « On rencontre aujourd’hui des difficultés importantes à recruter des personnels pour les missions d’inspection sanitaire en abattoirs […].
Ces difficultés créent des situations tendues dans les équipes des services vétérinaires d’inspection pour la réalisation des missions quotidiennes avec un risque que la responsabilité des agents, tout comme celle de l’État, soit engagée. Tout cela contribue à diminuer l’attractivité des postes en abattoir. Les risques de contentieux avec l’Union européenne pour non-respect de la réglementation ainsi que les risques médiatiques et économiques 
[…] sont considérables. Il apparait nécessaire de prendre rapidement des mesures pour stopper cette “spirale négative” dans laquelle nos services semblent s’être engagés. »

On y apprend qu’il y a 210 postes vacants, qu’il existe pour les auxiliaires vétérinaires un « vrai problème de compétence », et que près de 60 abattoirs ne disposeraient pas d’un vétérinaire officiel attitré, soit 22 % des abattoirs où l’inspection vétérinaire doit être permanente. Ce rapport dresse un état des lieux désastreux du contrôle vétérinaire en abattoir, dont les animaux sont les premières victimes.

Des infractions induisant des souffrances inutiles ont été relevées pour des animaux d’autres espèces abattues à Craon. Malgré un étourdissement par électronarcose et au matador, des ovins reprennent conscience au moment de la saignéeLes chevaux sont étourdis dans les mêmes conditions que les bovins : défauts d’immobilisation et d’étourdissement.

La race bovine Rouge des prés bénéficie de l’appellation d’origine contrôlée (AOC) Maine-Anjou. Les éleveurs et les abatteurs doivent respecter un cahier des charges dont certains éléments concernent la mise à mort de ces bovins :

  • « La manipulation des animaux avant l’abattage est réalisée de manière à minimiser les facteurs susceptibles de leur causer du stress et d’influencer la qualité du produit final. »

  • « L’abattage intervient dans un délai maximum de trois heures après la fin du déchargement. »

  • « Les animaux sont assommés dans les cinq secondes qui suivent leur entrée dans le piège d’abattage. »

Ces trois aspects du cahier des charges ne sont nullement respectés.
Dans cette vidéo, cette vache Rouge des prés est arrivée en bouverie à 15 h le 6 novembre 2023, et a été amenée dans le piège le lendemain à 10 h, elle est restée dans le box d’immobilisation pendant 2 min 25, et a été abattue à 10 h 07, soit 19 h après son arrivée.

L214 porte plainte pour tromperie du consommateur.

Lien vers la pétition


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2 commentaires

  • Barriol

    19 janvier 2024 à 19h29

    Quelle horreur. Comment peut on appeler. Es hommes …. DES. BOURREAUX
    ils devraient tous être punis l
    Entreprise comme les employés. Car ils le font sciemment

    Répondre

  • Chouly

    18 janvier 2024 à 8h56

    Cet abattoir doit fermer vu les horreurs

    Répondre

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